d’assez grandes distances au-dessus de la surface des
eaux : nous retrouvons parmi les exocets le même attribut;
et comme, très-avancés déjà dans la revue des
poissons que nous avons entreprise, nous n’aurons
plus d’occasion d’examiner cette sorte de privilège
accordé par la Nature à un petit nombre des animaux
dont nous sommes les historiens, jetons un dernier
coup-d’oeil sur ce phénomène remarquable, qui démontre
si bien ce que nous avons tâché de prouver, en
tant d’endroits de cet ouvrage; c’est-à-dire, que voler
est nager dans l’air, et que nager est voler au sein des
eaux.
L”exocet volant, comme les autres exocets, est bel à
voir : mais sa beauté, ou plutôt son éclat, ne lui sert
qu a le faire découvrir de plus loin par des ennemis
contre lesquels il a été laissé sans défense. L’un des
plus misérables des habitans des eaux, continuellement
inquiété, agité, poursuivi par des scombres ou
des coryphènes, s’il abandonne, pour leur échapper,
l’élément dans lequel il est né, s’il s’élève dans l’atmosphère,
s’il décrit dans l’air une courbe plus ou moins
prolongée, il trouve, en retombant dans la mer, un
nouvel ennemi, dont la dent meurtrière le saisit, le
déchire.et le dévore; ou, pendant la durée de son court
trajet, il devient la proie des frégates et des autres
oiseaux carnassiers qui infestent la surface de l’océan,
le découvrent du haut des nues, et tombent sur lui
avec la rapidité de.l’éclair. Veut-il chercher sa sûreté
sur le pont des vaisseaux dont il s’approche pendant
son espèce de vol? le bon goût de sa chair lui ôte ce
dernier asyle; le passager avide lui a bientôt donné la
mort qu’il vouloit éviter. Et comme si tout ce qui peut
avoir rapport à cet animal, en apparence si privilégié,
et dans la réalité si disgracié, devoit retracer le
malheur de sa condition, lorsque les. astronomes ont
placé son image dans le ciel, ils ont mis à côté celle de
la dorade, l’un de ses plus dangereux ennemis.
La parure brillante que nous devons compter parmi
les causes de ses tourmens et de sa perte,’'se compose
de l’éclat argentin qui resplendit sur presque toute sa
surface, dont l’agrément est augmenté par l’azur du
sommet de la' tête y. du dos et des côtés, et dont les
teintes sont relevées par le bleu plus foncé de la nageoire
dorsale, ainsi que de celles de la poitrine et de
la queue.
La tête du volant est un peu aplatie par-dessus, parles
côtés et par-devant. La mâchoire d’en-bas est pius
avancée que la supérieure ; cette dernière peut s’alon-
ger de manière à donner à l’ouverture de la bouche
une forme tubuleuse et un peu cylindrique : l’une et
l’autre sont garnies de dents si petites, qu’elles échappent
presque à l’oeil, et ne sont guère sensibles qu’au
tact. Le palais est lisse, ainsi que la langue, qui est
d’ailleurs à demi cartilagineuse, courte, arrondie dans
le bout, et comme taillée eu biseau à cette extrémité.
L’ouverture des narines, qui touche presque.l’oeil, est