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éclot, se développe et se reproduit, et l’habitation touchante
et simple des vertus bienfaisantes, des affections
douces, de l’heureuse médiocrité dont il sert si
souvent aux repas salutaires. On le trouve dans les
eaux de l’Europe dont le sel n’altere pas la pureté, et
particulièrement dans celles qui reposent ou coulent
mollement et sans mélange sur un fond sablonneux. 11
préfère les lacs que la tempête n’agite pas. Il J passe
l’hiver; et lorsque le printemps est arrivé, il remonte
dans les rivières, où il dépose sur les pierres sa laite
ou ses oeufs dont la couleur est bleuâtre et le volume
très-petit. Il ne se débarrasse de ce poids incommode
que peu à peu , et en employant souvent près d’un
mois à cette opération, dont la lenteur prouve que
tous les oeufs ne parviennent pas à la fois à la maturité,
et que les diverses parties de la laite ne sont entièrement
formées que successivement. Dans quelques rivières,
et notamment dans celle de la Corrèze, il ne
fréquente ordinairement les frayères * que depuis le
coucher du soleil jusqu’au lever de cet astre.
Le tribun Pénières, de qui nous tenons cette dernière
observation, nous a écrit que, dans le Cantal et la Corrèze,
les femelles de l’espèce du goujon, et de plusieurs
autres espèces de poissons, étoient cinq ou six
fois plus nombreuses que les mâles.
Vers l’automne, les goujons reviennent dans les lacs.
* Nom donné dans plusieurs contrées aux endroits outraient les poissons.
On les prend de plusieurs manières; on les pêche avec
des filets et avec l’hameçon. Ils sont d’ailleurs la proie
des oiseaux d’eau, ainsi que des grands poissons, et
cependant ils sont très-multipliés. Ils vivent de plantes,
de petits oeufs, de vers, de débris de corps organisés.
Ils paroissent se plaire plusieurs ensemble; on les rencontre
presque toujours réunis en troupes nombreuses.
Us perdent difficilement la vie. A peine parviennent-ils
à la longueur d’un ou deux décimètres.
Leur canal intestinal présente deux sinuosités ; quatorze
côtes soutiennent de chaque côté l’épine dorsale,
qui renferme trente-neuf vertèbres.
Leur mâchoire supérieure est un peu plus avancée
que celle de dessous; leurs écailles sont grandes, à
proportion de leurs principales dimensions; leur ligne
latérale est droite.
Leurs couleurs varient avec leur âge, leur nourriture,
et la nature de l’eau dans laquelle ils sont plongés
: mais le plus souvent un bleu noirâtre règne sur
leur dos; leurs côtés sont bleus dans leur partie supérieure;
le bas de ces mêmes côtés, et le dessous du
corps, offrent dés teintes mêlées de blanc et de jaune ;
des taches bleues sont placées sur la ligne latérale ; et
l’on voit des taches noires sur la caudale et sur la
dorsale, qui sont jaunâtres ou rougeâtres, comme les
autres nageoires.
Les tanches sont aussi sujettes que les goujons à
varier dans leurs nuances, suivant l’âge, le sexe, le
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