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168 VOYAGE
de bonnes raisons pour la rendre telle. Si la corvette
lût tombée sur les rochers qui nous menaçaient, certainement
elle ne fût pas restée cinq minutes entière,
et il est bien douteux qu’un seul homme eût pu s’échapper
jusqu’à la côte glacée de l’île Snow, où d’ailleurs
rien ne l’attendait que la plus misérable fin.
Mieux avisé ou plus heureux, le capitaine Jacquinot
avait su mieux se maintenir au plus p rè s , et il était à
un mille plus au vent quand il nous fallut surcharger
de voiles la pauvre Astrolabe. Toutefois il m’a confessé,
par la suite, qu’il avait eu de vives inquiétudes
pour le salut de la Zélée, et qu’il regardait à peu près
\Astrolabe comme perdue.
Une fois hors de danger , nous avons jeté les
yeux sur les terres en vue. Par bâbord se trouvait
l’île Smith ou Mont Pisco des premiers pêcheurs de
phoques, immense pâté qui s’élève du sein des eaux à
une grande hauteur, et presque entièrement couvert
de neige. Sur tribord, nous laissons Snow, île basse ,
uniforme, toute couverte d’une neige plus ou moins
terne et salie, entourée d’une chaîne de rochers noirs,
aigus et de l’aspect le plus triste. Ceux-ci semblaient
eux-mêmes cernés par une ceinture de brisants. Au-
delà de Snow, vient Tîle Rugged, amas informe de
pics dentelés, dont plusieurs sont dépouillés de neige.
L’oeil entrevoit enfin, dans le lointain, les âpres sommets
de Livingston, mais la brume nous en dérobe
tous les détails *.
" Note 134.
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AU POLE SUD. 169
Sur le point de dire un adieu définitif aux tristes
parages qui avaient été, durant près de deux mois, le
théâtre de nos opérations, de nos ennuis et de nos
misères , on me permettra sans doute encore quelques
réflexions sur ie résultat de nos efforts et sur le
genre d’intérêt qu’ils peuvent offrir.
Pour éviter toute espèce de mal entendu et couper
court aux objections ou récriminations malveillantes
qui pourraient être alléguées par les personnes mal
disposées en faveur de nos travaux, je confesserai
moi-même que cette première tentative échoua tout-
à-fait quant au but principal et presque spécial qu’on
lui avait assigné. Il s’agissait, ainsi que nous l’avons
souvent dit, de se diriger sur les traces de Weddell et
de chercher à les dépasser pour s’approcher autant
qu’il serait possible du pôle austral. Loin de pouvoir
atteindre à la limite de cet Anglais, nous avons été arrêtés
constamment par une banquise solide et impénétrable,
dès les parallèles de 64” et 63“ de latitude
australe. Nous avons tenté vainement de pénétrer,
par trois fois, dans cette banquise; deux fois nous
avons pu nous en dégager sans trop de peine ; mais la
troisième fois, nous y sommes restés bloqués, et ce
n ’est que par une éventualité, sur laquelle il ne serait
pas prudent de compter, que nous avons pu nous
échapper de notre prison de glaces. Enfin, nous avons
traversé tous les points par où Weddell s’était avancé
vers le sud, et nulle part cette barrière n’a cessé
d’être impénétrable. C’est un fait que tous mes com-
jiagnons de voyage ont reconnu et à l’égard duquel,
1838.
Mars.