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18.
19.
page se ressent des influences pernicieuses du froid et
de riiumidité ; le nombre des malades qui se borne
habituellement à trois ou quatre, s’élève à sept ou
huit. Il en résulte déjà un vide sensible pour le service
du bord. Nos matelots sentent que la prime qui
leur était promise est bien aventurée, et ils s’en consolent
par des railleries piquantes.
Toute la matinée, le temps est couvert et encore
très-noir du S. au S.E.; mais après midi, le vent passe
à l’est et E. N. E. en fraîchissant; notre sillage
s’élève à quatre ou cinq noeuds. Le nombre des glaces
augmente par degrés et nous en comptons jusqu’à
quarante-sept. Au soir le ciel est brumeux et il tombe
de la neige fondue, tellement qne la prudence me
commande de passer la nuit aux petits bords. Ces
retards me contrarient cruellement, mais il faut savoir
prendre son parti.
Dans la n u it, le vent avait tellement fraîchi qu’il
soufflait grand frais d’est à TE. N. E. avec de fortes
rafales et une grosse mer, un temps fort couvert et
un horizon très-borné. Cependant, à deux heures un
quart, laissant porter à l’O. A S. 0. nous filons six,
sept et huit noeuds sous les huniers seuls. Une grosse
houle nous fait rouler bord sur bord d’une façon très-
maussade. Nous comptons régulièrement une vingtaine
de glaces sur la petite étendue de mer visible.
Quelques-unes, fort hantes et fort grandes, nous annoncent
déjà la proximité des terres dont elles proviennent.
Souvent elles nous obligent à venir d’un
bord ou de l’autre pour les éviter.
À six heures du soir, pour me mettre en garde
contre l’action du courant, qui a presque toujours
porté au nord, je gouverne à l’O. S. 0 . Le vent continue
à l’est très-fort, les lames atteignent 8 mètres
d’élévation, le temps est sombre et la mer semée de
grosses glaces.
Un moment avant de laisser porter, à travers la
brunie je venais de découvrir un bloc d’une prodi-
digieuse étendue, et chacun de nous douta longtemps
si ce n’était pas réellement une terre : mais en approchant
et dans une éclaircie, nous pûmes nous
assurer que c’était un immense bloc de glace, à
flancs imitant une énorme falaise verticale, à cime
parfaitement aplatie et uniforme comme une table
horizontale et couverte d’une neige éblouissante de
blancheur. Les angles et les relèvements pris par
M. Dumoulin ont assigné à ce formidable glaçon
une longueur de plus de onze milles sur trente-six
mètres de hauteur. On voyait de chaque côté deux
fragments de même élévation et longs de 2,500 à 3,000
mètres, qui en avaient sans doute fait primitiAoement
partie. Malheur au navire que le vent ou le calme ferait
inopinément tomber sur une masse semblable,
dans sa partie exposée au vent, avec une mer eomme
celle que nous avions ! Sa perte serait prompte et inévitable
, car il chercherait en vain des points d’appui
pour tenter de se relever, et le ressac l’aurait bientôt
mis en pièces. Les équipages n ’auraient pas même la
ressource de songer à gravir sur l’inaccessible masse;
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