1838.
Janvier.
ifi.
gère et fugitive. Ce bloc était vraiment remarquable
et paraissait avoir 40 mètres de hauteur sur 60 de
longueur ; mais à nos yeux encore novices, il parut
bien plus monstrueux, et chacun de nous fut disposé
à lui assigner des dimensions au moins doubles*.
Le vent souffla bon frais du nord avec des rafales
accompagnées de pluie et de neige fondue, et une
mer dure qui grossit continuellement. Une vigilance
incessante commença à devenir indispensable.
Toute la nuit le vent souffla grand frais avec une
mer dure. A minuit, ayant repris tribord amures,
nous revîmes successivement toutes les glaces de la
veille, mais nous n ’en aperçûmes pas d’autres. A
six heures quarante minutes, l’horizon étant moins
chargé, je laissai porter à l’e s t, et à onze heures le
vent ayant diminué, je revins jusqu’au S. E.
En ce moment, je m’estimais à quinze lieues au
nord de l’île Eléphant, et je me croyais bien en position
de reconnaître Clarence. Dans cette intention,
à midi je mis le cap au S. S. E. et nous pûmes filer
cinq noeuds et demi à travers une mer encore très-
dure. A trois heures la brume se dissipa ; la partie
supérieure du ciel était parfaitement p u re , mais l’horizon
était gras. Aussi, malgré notre vigilance, nous
fut-il impossible de rien découvrir de positif. Seulement
on remarquait dans toute la partie du S. E. une
bande plus foncée , bien stationnaire, comme si elle
eût reposé sur des terres.
Notes 3, 4? 5, 6^ 7 et8.
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Je laissai porter vers Test; enfin, à neuf heures
du soir, le point me plaçant à deux milles seulement
au nord de la pointe septentrionale de Clarence
, et la bande brune persistant, je me décidai
à rester aux petits bords pour la n u it, dans la
crainte d’être entraîné inopinément sur la te rre ,
ou de la dépasser en continuant de faire route.
Au même moment le soleil venait de se coucher et
sa disparition avait été précédée par des nuages d’un
aspect très-bizarre. L’un d’eux surtout, aifectant la
forme d’une coupe antique élancée, mais évasée smses
bords, montée sur un haut piédestal, et entourée
à sa base de diverses figures grotesques, persista près
de dix minutes dans la direction du sud. Ses formes,
dessinées sur un fond d’azur sans tache, étaient si
tranchées, si saillantes, qu’on eût dit un bloc solide
de marbre ou de granit doucement éclairé d’un côté,
tandis que l’autre moitié se trouvait dans l’ombre. Cette
image s’élevait dans une position parfaitement verticale,
et sa hauteur pouvait remplir un espace d’environ
quinze degrés sur la voûte des cieux. Ce curieux spectacle
fixa longtemps mes regards, et je regrettai vivement
de n’avoir pas un peintre à ma disposition pour
le retracer avec fidélité. Du re ste , il paraît qu il ne
produisit pas la même impression sur mes compagnons
de voyage. En compulsant tous leurs journaux,
je ne trouvai que MM. Gourdin et Desgraz qui en
eussent fait une courte mention *