periiciellc, mais les flancs de la corvette sont tellement serrés
qu’elle ne ressent plus le choc des glaçons. On entend encore les
brisants dans le N. 0 . Mais la mer libre paraît s’éloigner, les dérives
éparses, chassées par le vent et la houle du large, se jettent
sur la banquise dont elles augmentent l’épaisseur. Notre position
est bien loin de s’améliocer. Cette permanence des vents du nord
diminue les chances de délivrance qui pouvaient nous rester. La
première gelée peut souder les glaçons et nous enchaîner pour
l’hiver. La rigueur du climat et l’extrême fatigue commencent
à exercer sur notre équipage une fâcheuse influence. Plusieurs
sont atteints de dissenteries, d’ophthalmies , de rhumatismes.
Mais, malgré tous ces contre-temps, personne àbordne croit à un
hivernage dans ces tristes climats ; il suffit d’une expansion de la
banquise et d’un vent du S. E. au S. 0 . pour nous mettre en
liberté.
Si la pointe vers le pôle austral qui a été faite par le capitaine
Weddell est bien une réalité (et jusqu’ici personne ne croit avoir
le droit de le niei'), il faut convenir que nous avons rencontré
une saison bien défavorable. Dans notre première tentative, nous
avons trouvé la mer solide par 63° 5o' lat. S. et 4y° long. O. Cette
barrière infranchissable que nous avons cotoyée plus de cinquante
lieues, jusqu’aux îles Orkney, n’existait point pour les
capitaines Powell et Weddell. Parvenus sous le méridien de
4i°, nous retrouvons encore la mer gelée dans toutes les directions
et aussi loin que la vue peut s’étendre du haut des mâts,
sous le parallèle de 6a° 22'. Cette banquise, dans laquelle nous
sommes aujoiu-d’hvii bloqués et qui n’est pour nous que trop
réelle , n’existait point pour le capitaine Weddell dans la même
saison, le même mois, le même jour. Depuis quinze jours, la température
de l’air et celle de l’eau se maintiennent à zéro, souvent
même au-dessous, et le capitaine Weddell a consigné dans son
jovirnal des températures plus douces, dans la période correspondante.
Nous avons des vents du N., N. E., N. O., grand
li ais. de la brume, de la neige , et le navigateur anglais a des
temps généralement beaux, avec des brises modérées du S.,S.E.,
S. O. Que conclure de là?... Que dans tous les pays du monde,
dans les mers polaires comme dans nos climats , le cours des saisons,
loin d’ètre régulier, est souvent sujet à de grandes perturbations.
(M. Roquemaurel.)
Note 86, page ii4-
.lusqu’au jour,nous avons eu un temps couvert,brume épaisse,
neige et pluie, houle du N. 0 ., faible brise du N. E., variable
à l’E. au S. E. et fraîchissant. Le matin, la banquise avait toujours
la même consistance, mais la cessation des vents du nord
nous faisait espérer une prochaine délivrance. Une seule brise du
S. S. E. n’avait pu ébranler la banquise ; mais ayant, dans une
éclaircie, aperçu la mer dans le N. O., on résolut de iaire une
nouvelle tentative pour sortir d’une position qui pouvait de jour
en jour devenir plus critique.
La Zélée qui nous restait à un mille dans le sud, commença son
mouvement à dix heures; nous ne tardâmes pas à en fiüreautant,
et appareillâmes les voiles en tâchant d’éviter la corvette vers le
N, Ü., à l’aide des aussières el du cabestan. Mais les glaces étaient
si pressées autour de nous et si volumineuses, que nous restâmes
longtemps immobiles, malgré la forte brise qui enflait nos voiles.
Alors on désespéra presque de pouvoir échapper à l’hiver de ces
régions glacées. Le temps était sombre, le froid vif, et la plaine
de glaces restait toujours compacte, malgré la violence du vent
qui semblait devoir la désunir. Nous ne pouvions guere compter
sur le dégel.
Cependant, sans perdre courage, 011 travailla a mettre en pieces
un gros bloc qui nous barrait le passage. L’opération fut longue
et pénible. On ne saurait trop louer l’ardeur cl la patience, dont
f i " !
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