1838.
Janvier.
II l'2.
34 VOYAGE
vent, à midi précis, nous passions à trois milles au
plus du cap Saint-Jean, extrémité orientale de File des
États, morne médiocrement élevé, dénudé et couronné
par quelques rochers arides.
La longitude déduite des observations de M. Demas
à dix heures , heure à laquelle nous relevions l’entrée
du port Cook au sud du monde, ne diffère que de deux
minutes environ de celle qui lui a été assignée par
Foster : les latitudes étaient les mêmes.
A midi, je mets le cap à FE. S. E. route définitive
pour quelque temps, si le vent le permet. Vers quatre
heures, le ciel se charge dans le S. 0 . et le vent s’y
établit avec la pluie. Mais à sept le ciel s’éclaircit ;
nous revoyons les montagnes de 1 île des États et meme
quelques sommets de la Terre de Feu: Un brick de
grande dimension se montre dans le sud à bonne distance
et paraît faire route vers l’ouest. Quant à nous,
tous nos efforts tendent désormais à rallier les régions
polaires.
Nous continuons de cheminer lentement avec de
faibles brises variables de l’ouest au nord. Sur les cinq
heures et demie du matin, nous avons fait nos derniers
adieux à la terre des États, qui a bientôt disparu au
travers de brumes légères. Dans l’après-midi, nous
filons quatre ou cinq noeuds par une mer assez douce,
avec une jolie brise variable du N. N. 0 . au N. E.
Les matelots de \ Astrolabe , que la perspective des
glaces avait quelque temps inquiétés, ont l’cpris courage
, j’apprends même qu’un souci tout différent les
agite maintenant; ils auraient peur que je ne les conduisisse
pas assez loin. C’est ce que l’événement décidera,
et nous verrons bien si leur ardeur se soutiendra.
Cela me prouve du reste que la digression du détroit
de Magellan leur a été favorable, en procurant un aliment
fécond à leur imagination et à leurs causeries
Pour moi, je suis repris par les fâcheux maux de tête
qui me tourmentaient avant de donner dans ce détroit.
Le jour suivant, nous poursuivions notre route au
S. E. ^ E. quand à sept heures du matin la brume nous
environna si épaisse que nous pouvions à peine apercevoir
la Zélée, distante au plus de trois longueurs
de navire. Nous fûmes obligés de manoeuvrer avec
beaucoup d’attention, et cela nous donna Favant-
goût du métier que nous allions être forcés de faire
dans les glaces *. Le soir la brume se dissipe pour faire
place au calme accompagné d’une pluie continuelle.
Les deux navires se sont tenus pendant quelque
temps si près l’un de l’au tre, sans pouvoir gouverner,
qu’un abordage a failli avoir lieu.
La pluie ne cesse qu’à neuf heures du matin, puis
le soleil reparaît et ramène les oiseaux qui avaient
disparu, savoir : albatros, pétrels divers, alcyons
et petits plongeons. La brise du S. 0. qui avait pris
le matin, fraîchit dans la soirée , et nous filons
toujours au S. E. ^ E.
La température baisse rapidement et les vapeurs
très-fraîches qui obscurcissent l’horizon, malgré la
pureté du ciel, annoncent la proximité des glaces.
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