li';
■;■ ' fHiii
1838.
Janvier.
17.
40 VOYAGE
Aussitôt que la brume disparaît, les oiseaux reviennent
en foule. Aujourd’hui l’on a vu quelques baleines
, et j ’ai observé une douzaine de poissons au
corps court et ramassé , longs de 3 à 4 décimètres,
que j ’ai d’abord pris pour des scombres; mais leur
nage est différente et ils cheminent par bonds, tout-
à-fait comme des marsouins, ce qui m’a fait présumer
que c’était une petite espèce de dauphins.
A dîner, j’ai fait donner aux deux équipages double
ration pour fêter la vue des premières glaces.
A neuf heures et demie du matin , l’horizon s’étendant
à trois ou quatre milles, j ’ai laissé porter
au S. E. filant près de cinq milles sous les huniers
seuls. Mais au bout d’une heure la pluie survient, et
dès quatre heures quinze minutes, l’horizon est si
rapproché que je remets la corvette aux petits bords.
A trois heures, la brume est très-intense et ne nous
permet pas de reconnaître une montagne de glace
à une encâbliire de distance. Je prévois dès-lors
qu’elle sera pour nous une ennemie plus redoutable
que les glaces elles-mêmes : elle paralyse nos mouvements,
et tout en tenant prudemment la panne
ou la cape, nous n ’en courons pas moins le risque
d’être portés par les courants sur quelques-uns de ces
dangereux blocs *.
Pour tirer quelque profit de ce retard, je fais
descendre le thermométrographe à 250 brasses
de profondeur. La température des eaux superfi-
* Note t i .
cielles était alors à 2", et celle des eaux inférieures a
baissé à 0”,5. Il tombe une neige fondue chassée par
une brise assez fraîche qui gèle là figure et les mains,
et fait baisser le thermomètre à 1". ïoutannonce que
nous sommes environnés de glaces dont la présence
maintient la température atmosphérique à cet état.
Dans l’après-midi, la brume demeure si épaisse
que, malgré tous nos soins, nous perdons quelquefois
la Zélée de vue. Parfois cependant le soleil se montre
quelques instants , comme au travers d un voile très-
épais, tandis q u e l’horizon ne se dégage jamais.
A la n u it, il vente bon frais d’ouest, avec une mer
assez grosse. Je suis toujours forcé de rester aux
petits bords, à cause de la brume impénétrable.
Malgré toutes mes précautions, nous perdons encore
la Zélée une bonne partie de la nuit et ne la rejoignons
qu’à deux heures du jour suivant.
Cette brume malencontreuse est déjà cause pour
nous d’un grand inconvénient ; je n ai pu reconnaître,
comme je le désirais, l’île Clarence; le courant m’a
entraîné sous le vent et je vais être obligé de me diriger
au sud, dès que le temps va me le permettre ;
arrivé sur le parallèle de 61°, j’ai déjà dépassé celui
des New-South-Orkney.
L’horizon s’étant un peu dégagé, je fais mettre le
cap à l’est et nous filons six noeuds. Nonobstant mes
recommandations, en me présentant sur le pont à
six heures et demie, devant nous, à cinq ou six milles,
je découvre dans le sud une île de glace dont j estime
la bailleur à 50 mèlres au moins, el que personne
1838.
Janvier.
18.
VJ