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1S38.
Janvier.
54 VOYAGE
complète et générale et la joie universelle. Déjà je
croyais avoir retrouvé la fameuse terre de New-South-
Greenland, dont Morrell prétendait avoir suivi la côte
l’espace de plusieurs centaines de milles, et qui devait
se trouver à peu près dans ces parages. Mais, hélas!
M. Dumoulin avait déjà fait plusieurs relèvements,
quand au bout d’une heure environ, je vis les formes
de notre terre s’altérer, se déformer, puis changer
complètement. Force nous fut alors de dire adieu
à nos joyeuses espérances. Bien certainement si des
nuages ou une brume survenant brusquement nous
eussent ravi la vue de cette apparence de te rre , je
ne m’en serais éloigné qu’avec la confiance presque
entière que la terre existait en ces parages, et cette
leçon m’apprit à être plus défiant que jamais pour la
suite. Il est probable que le capitaine Wilkes fut la
dupe d’une semblable illusion, quand il annonça la
terre là où le capitaine James Ross, a-t-on dit, l’a
inutilement cherchée sur ses indications.
Dans la matinée, j’ai fait faire l’exercice des avirons
de galère par nos matelots, et après les avoir
fait armer et désarmer quatre ou cinq fois, j ’ai vu
que cette manoeuvre pourrait se faire avec assez de
rapidité et de fruit pour nous tirer de plus d’un mauvais
pas. Dans la journée même j’en ai acquis la
preuve convaincante : en effet, sur les deux heures
et demie après midi, comme je passais à 100 mètres
environ sous le vent d’un gros îlot de glace haut de
25 métrés et d’une grande étendue, il nous intercepta
la brise déjà très-faible. Par une conséquence
AU rOLE SUD. 55
naiLirclle, les voiles mas(pièrent et nous tondjîons rapidement
sur le glaçon dont les parois escarpées
nous surplombaient, et nous étions menacés d un
abordage imminent par l’eifct de la houle qui bal
toujours violemment contre les b lo c s, même avec la
mer la plus belle ; nos avirons de galère armés avec
dextérité et maniés avec vigueur nous tirèrent d’embarras
en moins de dix minutes. Nous restâmes ensuite
en calme à trois milles de la banquise sans pouvoir
gouverner.
A quatre heures un quart, pour utiliser notre repos
forcé, je me décidai à expédier un canot vers un îloi
de glace situé à un mille dans le S. E. dont la pente
très-douce, jusqu’au niveau de la m e r, promellail
un accès facile. P ar-là, je voulais procurer à M. Dumoulin
la facilité d’exécuter des observations magnétiques;
MM. Roquemaurel, Hombron, Gervaize et
Le Breton l’accompagnèrent pour s’y acquitter de
diverses sortes de recherches*.
Deux heures après, voyant la brise s’élever duS.E.
el en même temps une panne assez épaisse qui me
présageait de la brume, je donnai l’ordre élu retour
au canot, el il nous rejoignit à six heures et demie
précises. M. Dumoulin avait heureusement accompli
toutes scs observations ainsi que ses compagnons, el
il était giand temps que l’embarcation nous ralliai,
car à peine avait-elle touché le bord, que la panne
de l)rumc qui venait de moiitei’ avec une rapidité
1838.
JaiivitM.
i ‘l. XV