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VOYAGE
CHAPITRE LXVIÏ.
Séjour (Ians la baiií des lies.
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Il éfflit presque nuit lorsque nous mouillâmes sur
la baie deslíes. Aussitôt que le jour se lit, chacun de
nous se hâta de monter sur le pont pour jouir de la
vue des terres environnantes. En face de nous, â
petite distance , se trouvait le village de Korora-
Reka, composé de cases couvertes en chaume, et
habitées par des émigrants anglais. Au milieu d’elles,
Ton entrevoyait quelques rares habitations indigènes,
misérables réduits indiquant la misère la plus complète;
sur tout le contour de la baie, on voyait aussi
de petites maisonnettes blanches, jetées çà et là sur
le rivage ; et enfin, au fond, auprès d’une rivière,
on apercevait les établissements des missions protestantes.
Les eaux de la rade étaient sillonnées
par de nombreuses embarcations; dans les passes,
trois navires, parmi lesquels se trouvait une corvette
de guerre anglaise, le He rald, faisaient
route pour sortir, tandis que d’autres bâtiments
cherchaient à gagner le mouillage. Enfin, autour de
nous, se balançaient sur leurs ancres une douzaine
de navires baleiniers, et le transport de guerre le
Buffalo. Nous eussions pu nous croire transportés
dans un port d’Europe, si nous n’avions aperçu en
même temps les terres environnantes couvertes de
forêts vierges ou de grandes herbes jaunes, indices
certains que l'agriculture avait fait bien peu de conquêtes
sur CCS terres encore sauvages.
De grand matin, le grand canot fut disposé pour
faire notre provision d’eau ; l’aigiiade est tellement
facile qu e, dans la journée, il put compléter la
quantité qui nous manquait. Chacun des officiers se
hâta de descendre à terre ; nos cuisiniers et nos pourvoyeurs
s’acheminèrent avec leurs paniers pour faire
leurs empiètes, comme s’ils se fussent trouves dans
un port français. Mais quel ne fut pas leur désappointe-
mentlorsque, aprèsavoir parcouru le village dans tous
les sens, ils furent obligés de regagner le bord, sans
provision aucune! On ne trouvait, en effet, rienaumi-
lieu de cette population européenne , comportant, disait
on, près de 800 individus, et qui ne subsistait
elle-même qu’à l’aide des vivres envoyés de Sidney.
A huit heures , je me rendis à terre, accompagné
du capitaine Jacquinot; je me dirigeai d abord vers la
modeste habitation de nos missionnaires, occupée
par l’abbé Petit; je sus de lui que le chef de la
mission, l’évôque de Pompalier, élait absent momentanément
: il faisait une tournée dans l’intérieur
des terres, et il n’était parti que depuis peu de jours.
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