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OÙ on lui a confié la surveillance d’une partie de l a
ligne. A Port-Arthur, il donnait des leçons de dessin
et de musique ; on était généralement convaincu de
son innocence, et tous les habitants notables s’étaient
réunis pour adresser une demande en grâce à la
reine.
Le pauvre C*** supporte son sort avec résignation ;
il s’exprime dans sa langue et môme en français avec
distinction. Il a fait, dans l’armée de don Carlos, les
campagnes de Navarre et de Biscaye, et a fait partie
do l’état-major de Zumalacarregui. Le gouverneur,
sir John Franklin, a lui-même apostille et adressé
sa demande en grâce à la reine.
Mais nous n’étions plus qu’à quelques milles du
but, déjà nous entendions les hurlements des chiens,
et bientôt nous débouchâmes d’un petit bois sur une
longue grève découverte à deux encablures au large.
Dans sa partie la plus étroite, l’isthme est coupé par
une longue ligne de chiens de différentes races, mais
tous d’une férocité éprouvée ; leurs chaînes sont tout
juste assez longues pour leur permettre de se flairer
le museau. Le malheureux qui tenterait de traverser
cette formidable barrière serait inévitablement mis
en pièces; furieux à notre approche, ils s’élançaient
au-devant de nous, et j’avoue que ce ne fut pas sans
un certain sentiment d’appréhension que je passai à
Fextrémité de la ligne. Sur la grève, on a placé, à des
distances très-rapprochées, et sur des pilotis assez
élevés pour que, dans les plus hautes marées, elles
soient au-dessus de l’eau, des niches, espèces de
petits forts, dans lesquels sont établis d’autres chiens
q u i, en cas d’évasion, donnent l’alarme aux sentinelles
échelonnées sur le rivage ; au large, la mer
déferle avec trop de force pour qu’un homme puisse
se hasarder sur les récifs.
Il y a là quarante à cinquante dogues furieux,
au moyen desquels je conçois que la position soit parfaitement
gardée. Parmi eu x , on m’a fait remarquer
un grand mâtin au poil fauve hérissé, à l’oeil sanglant,
dont le nez infaillible, l’instinct merveilleux,
a souvent fait retrouver des personnes égarées dans
les bois, et notamment le capitaine Bootb lui-même,
qui faillit y périr, il y a quelque temps, de faim et
de misère.
Comme je l’ai dit plus haut, les péninsules de Tasman
et de Forestier sont couvertes de forêts, dont les
arbres séculaires appartiennent aux mêmes genres et
sont parfaitement semblables; ce sont de gigantesques
troncs, q u i, s’élevant à des hauteurs incroyables
sans une pousse latérale, sont, à leurs sommets, garnis
d’une magnifique touffe de verdure : il faut donc une
grande habitude ou des guides parfaitement sûrs pour
pouvoir y trouver son chemin.
M. Bootb, marcheur infatigable, avait coutume de
parcourir de longues distances, de pousser de lointaines
reconnaissances au travers des bois. Jamais
ses observations ne l’avaient trompé, et toujours il
avait atteint le but qu’il s’était proposé.
Enhardi par ses succès, il voulut entreprendre une
plus longue excursion et gagner les districts colo-
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