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dans le havre Peraki pour en lever le plan détaillé.
La Zélée vint nous rejoindre dans la journée; je
ne voulus point quitter le bord avant de l’avoir vue
mouiller à nos côtés. Il était près de midi lorsque le
capitaine Jacquinot aborda l’échelle de ÏAslrolabe ;
il m’apprit que M. Gaillard, jeune officier de son
bord, donnait de vives inquiétudes depuis notre dernière
campagne dans les glaces. Cet officier, plein
d’ardeur, avait été chai’gé, depuis le 1" janvier, de
s’occuper des observations de physique en l’absence
de M. Coupvent, que j’avais pris à mon bord. Lorsque,
dans les glaces, en vue de la terre Adélie, j’avais envoyé
MM. Dumoulin et Coupvent sur une île flottante,
M. Gaillard avait demandé à son commandant de se
joindre à ces messieurs : victime de son z è le , il puisa
dans cette excursion une maladie de poitrine qui devait
lui être fatale. Au moment de notre arrivée à Akaroa,
le capitaine Jacquinot, en me rendant compte de
l’état fâcheux où se trouvait cet officier, m’assura
qu’il le croyait tout à fait incapable de pouvoir continuer
la campagne; je pris aussitôt la résolution de le
laisser à la Baie des lies, où j’espérais qu’il pourrait
recevoir des soins et regagner ensuite facilement la
France après un rétablissement, que je me plaisais à
espérer. Déjà des propositions de ce genre avaient été
faites à M. Gaillard lors de notre deuxième relâche à
Hobart-Town; mais il les avait rejetées; plus tard
encore il repoussa une nouvelle fois l’idée d’abandonner
son navire. Il devait payer de sa vie sa
participation aux travauxd’uiic expédition qu’il avait
volontairement entreprise. Ces tristes nouvelles m affligèrent
profondément; malheureusement, je ne
pouvais rien faire sur-le-champ, dans l’intérêt de
ce jeune officier, ca rie port d’Akaroa ne présentait
absolument aucune ressource.
Dans l’après-midi, j’allai faire une course à terre
avec le capitaine Jacquinot ; nous nous fîmes débarquer
près du village. Nous y trouvâmes une dizaine
de maisons entièrement semblables à celles
d’Otago, et peut-être plus misérables encore ; elles
étaient groupées sur les bords du petit ruisseau qui
nous servait d’aiguade: elles n’étaient habitées que
par une douzaine de naturels presque tous du sexe
féminin. Au milieu de ces sauvages, vivaient quelques
Anglais dont on reconnaissait facilement les
habitations sur les bords de la mer. A quelques pas
du village et dans le sud, on voyait u n p à , espèce de
village fortifié , totalement abandonné et tombant
en ruines; sur aucun autre point de la baie, on n a -
percevait de vestiges d’habitations; ainsi, la puissante
tribu d’Akaroa se réduisait, au moment de notre
passage, à quelques femmes échevelées, seules gardiennes
de ces huttes abandonnées. La baie silencieuse
paraissait déserte. Etonné de cet aspect, auquel
Je m’attendais peu, j’interrogeai à ce sujet les
Anglais restés paisibles possesseurs du sol : ils m apprirent
que, deux mois environ avant notre arrivée,
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la baie avait été envahie par les naturels de la baie
Dusky, qui avait commis d’affreuses dévastations dans
les environs, et massacré tous les naturels qui n a-