íi
t ■
'f1) ,
A i
■« .
î ■
1 8 4 0 .
11 Avril. de vivre sur le so l, mais encore de faire produire au
terrain des denrées qui alimentent le commerce; il
faut aussi qu’une colonie naissante puisse établir des
communications faciles avec Tintéiieur des terres,
de manière à s’étendre à mesure que l’émigration
lui apportera de nouveaux colons. Sous tous ces
points de vu e , le port d’Akaroa m’a paru désavantageux
pour fonder un établissement; il est vrai
que, dans ma conviction, ce serait une folle entreprise
que celle d’aller créer, à l’autre extrémité du
globe, des colonies agricoles françaises sur la Nouvelle
Zélande, en face des comptoirs australiens de
l’Angleterre, dont le succès aujourd’hui n’est plus
douteux. On ne saurait trop le répéter, si jamais la
France voulait entrer dans un système de colonisations
lointaines, ce serait s’exposer à un insuccès
certain que de commencer à transporter des colons
sur des pays aussi éloignés que la Nouvelle-Zélande,
sans posséder des points intermédiaires. Du reste, il
ne faudrait pas songer à défendre, en temps de guerre
avec l’Angleterre, ces possessions ainsi isolées, contre
les forces britanniques. En moins de huit jours,
les vaisseaux échelonnés dans les ports de l’Australie,
pourraient fondre sur ces colonies, tandis
qu’elles n’attendraient de secours que des rives
trop éloignées de la métropole. Toutefois, les ports
de la Nouvelle-Zélande sont suffisamment visités
par nos baleiniers, pour que le gouvernement français
ait dû songer sérieusement à protéger leur industrie.
Si, comme tout semble le faire présager, TAngieterre
doit soumctlrc toute la Nouvelle-Zélande a sa domination,
bientôt nos navires ne pourront plus aborder
dansces ports, sans subir des entraves ou bien sans
payer des droits considérables. Un simple poste militaire,
placé au port d’Akaroa, sans autre but que
celui d’offrir un abri h nos navires de commerce,
pourrait être fort utile. Il faudrait simplement assurer
à nos baleiniers un refuge pour eux contre le
mauvais temps, quelques moyens de ravitaillement,
et enfin l’autorité nécessaire pour réprimer les désordres
de leurs équipages souvent indisciplinés.
Dans le cas d’une guerre, la pêche de la baleine ne
serait plus possible pour nous; alors ce poste pour-
raitêtre évacué, etenfin, s’il était enlevé par l’ennemi,
nous n’aurions pas perdu grand chose.
Depuis notre passage au port d’Akaroa, tout le
monde sait que l’Angleterre a pris possession de la
Nouvelle-Zélande en entier. Quelques colons français
ont été transportés au port d’Akaroa ; quel sera
leur sort? On peut déjà le prévoir, et peut-être e st-il
trop tard aujourd’hui pour adopter aucun projet
d’établissement sur ces terres désormais couvertes par
le pavillon brilannique.
Dès le matin, nous nous étions préparés pour l’appareillage,
mais les vents étaient fixés au S. E., et de
plus la pluie tombait par torrents ; nous fûmes donc
forcés d’attendre un temps plus favorable. Jusqu’au
17 avril, nous ne pûmes pas nous éloigner de ce mouillage,
que j’avais cependant grande hâte de quitter.
Lorsque la pluie cessait de tomber, le calme ou les
12
17