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vaienl pu prendre la fuite. Après leur départ, la
tribu d’Akaroa s’était rassemblée pour user de représailles,
et depuis quelques jours seulement, les
guerriers de la baie avaient abandonné leurs foyers ;
ils devaient se joindre à ceux d’Otago, et avec leur
secours porter, à leur tour, l’agression au milieu de la
tribu ennemie. Pendant ce temps, leurs femmes et
leurs filles restaient au logis en attendant leur retour
et en pleurant ceux de leurs proches qui avaient péri.
Nous remarquâmes plusieurs de ces malheureuses
se livrant à des cérémonies de deuil : la figure en
sang, les cheveux en désordre, elles allaient de
distance en distance pousser des cris plaintifs près
des tombeaux, sur lesquels elles amoncelaint des tas
de petites pierres. Toutefois, cette douleur, commandée
par les usages du pays, ne paraissait pas être
bien profonde, car on les voyait s’égayer avec les matelots
occupés à l’aiguade, pendant les entr’actes de
ces scènes funèbres.
Le navire baleinier le Gange mettait à la voile
pour retourner en France, emportant avec lui
nos dépêches, lorsque je quittai le bord pour aller
visiter une maisonnette établie au sud du village.
Comme dans le port d’Otago, les spéculateurs sur
les terrains n’avaient pas manqué d’agioter à la baie
d’Akaroa; un Anglais de Sidney, nommé Cooper,
revendiquait, comme sa propriété, presque tout le
territoire de la baie; il n’avait d’autres titres que
ceux qu’il prétendait avoir acquis d’un chef zélandais,
sur tout le tei rain auquel il commandait. Certes
ces titresde propriété étaient plus que contestables, car
l’on citait d’autres personnes qui avaient aussi acheté
de chefs zélandais, dont l’autorité était fort étendue,
le territoire entier de la presqu’île de Banks. Quoi
qu’il en soit, l’Anglais Cooper avait fait acte de prise
de possession en exploitant une partie du terrain qu il
revendiquait. Il avait construit, à une demi-lieue du
rivage, une petite ferme assez confortable; un troupeau
de boeufs apportés de Sidney s’était rapidement
accru, et son propriétaire espérait de pouvoir bientôt
le répandre sur la presqu’île de Banks tout
entière; déjà il recueillait suffisamment de laitage
pour en vendre aux navires qui fréquentaient la
rade. Pendant notre séjour, les états-majors de nos
corvettes purent en avoir constamment pour leur consommation,
à un prix assez raisonnnable. Je passai
une journée agréable près de cette petite ferme, autour
de laquelle s ’étendent déjà des pâturages. Près
de là, je trouvai un joli ruisseau sur les bords duquel
je pus faire une ample récolte d’échantillons
d’histoire naturelle.
Au moment où j’atteignais le bord de 1 Astrolabe,
je vis arriver une mauvaise double pirogue du pays
montée par quelques naturels; l’un d’eux, paraissant
à peine âgé de vingt ans, et|de petite taille, se trouvait
le matin sur le navire le Gange. Au moment de son
départ, le capitaine lui avait donné, en échange
sans doute de quelques sacs de pommes de terre,
une mauvaise baleinière dont il se montrait fort glorieux.
11 élait accompagné par un autre individu d’une
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