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224 VOYAGE
fini par s’échouer. Chose bizarre, la Zé/ée avait,
comme nous, dérivé de plus d’une encablure dans la
môme direction, e t , comme nous au ssi, elle était
restée suspendue, pour ainsi dire, contre les flancs
du rocher madréporique.
Voici quelle était notre nouvelle position : on sait
que les récifs de coraux s’élèvent perpendiculairement
du fond de la m e r , comme les murailles de
nos habitations ; seulement, au lieu d’être polis comme
nos murs, ces rochers de coraux présentent de fortes
aspérités. L'Astrolabe, en venant échouer contre
ces parois, était restée, eu quelque sorte suspendue
sur leurs aspérités ; l’un de ses côtés s’appuyait
sur le récif, tandis que les eaux de la mer la soutenaient,
par leur pression, de l’autre bord. A cinq
heures du malin, la mer commençait seulement à
descendre, et la corvette s’inclinait légèrement; mais
à mesure que, par l’effet de la marée, les eaux se retirèrent,
l’Asfro/aôc commença à donner une bande
de plus en plus forte qui nous fil redouter de 1a voir
bientôt chavirer. Vainement, pour éviter un pareil
désastre, nous voulûmes essayer de la soutenir, avec
nos mâts de hune de rechange, installés en béquille.
Non-seulement ceux-ci n’avaient pas une longueur
suffisante pour s’appuyer sur le fond, mais encore le
courant de marée, qui atteignait une vitesse de près
de deux noeuds, rendait toute tenlalive de ce genre â
peu près impossible. Bientôt notre pauvre corvette
s’inclina fortement sur bâbord tandis qu’elle
laissait voir à nu tout son flanc de tribord. La
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DANS L’OCÉANIE. 225
Zélée était moins inclinée que l’Astrolabe; elle avait
été portée plus en avant de la bande des récifs, et à
la basse mer elle se trouva presqu’à sec. En ce moment,
les deux corvettes paraissaient être arrivés à la
fin de leur pénible navigation ; elles avaient tout à
fait l’aspect de deux bâtiments naufragés. Cepen-Pi.cLxxxvii.
dant, nous étions loin d’avoir perdu tout espoir. Nous
attendions avec impatience le retour de la marée
de f lo t, pensant que la mer montante nous permettrait
de nous renflouer en nous appuyant sur des ancres
mouillées par notre travers.
 trois heures de l’après-midi, la mer était é ta le ,
et le flot ne nous avait fait faire aucun mouvement;
les deux corvettes étaient toujours presque entièrement
hors de l’eau. Ce résultat inattendu me fit considérer
notre position comme étant des plus fâcheuses,
car si les marées ne devaient pas être plus fortes à
l’avenir, il devenait tout à fait impossible de nous
remettre à flot. Nous avions pu être porté sur le
récif par des circonstances tout exceptionnelles et
que nous n’expliquions pas; dès lors il nous restait
bien peu de chances de pouvoir nous relever de notre
échouage. Les réflexions les plus tristes se croisaient
dans mon esprit ; l’avenir se présentait sous un aspect
accablant.Nos corvettes comptaient déjà trente-quatre
mois de campagne ; vainement, pendant cette longue
navigation, elles avaient échappé aux périls sans
nombre qui les avaient menacées. Elles étaient sorties
victorieuses de leurs luttes dans les glaces, pour
venir finir misérablement sur un récif sans nom. Il
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