de marcher; il la suspend par le milieu à sa ceinture.
L’accouplement, l’action d’enchaîner deux à deux
des hommes différents de caractère, de vices, de
crimes, la plus affreuse torture qu’on ait jamais inventée,
est inconnue dans les colonies pénitentiaires
anglaises ; et, en somme, la condition des condamnés,
si misérable qu’elle soit, est supérieure à celle
de nos forçats.
Sauf quelques modifications, les femmes vivent
sous la même discipline que les hommes ; elles sont
renfermées dans des maisons de correction ou allouées
comme servantes aux colons. Toutes les statistiques
, tous les rapports officiels , les signalent
comme plus profondément dépravées que les hommes,
surtout lorsqu’elles ont atteint un certain âge. J’en ai
vu beaucoup dans les fermes chez des colons, et partout
on s’en plaignait plus que des hommes. Plusieurs
insurrections avaient eu lieu dans les maisons de correction
, et pendant mon séjour dans la colonie, deux
de ces créatures furent pendues pour avoir assassiné
une surveillante avec un raffinement de barbarie dont
il est impossible de se faire une idée. Quand elles
sont au service des particuliers, elles reçoivent annuellement,
pour leur entretien, une robe de coton,
deux camisoles de nuit, trois chemises, deux jupons
de flanelle, deux jupons d’étoffe, trois paires de souliers,
trois bonnets de calicot, trois paires de bas,
deux mouchoirs de c o u , trois tabliers de travail et un
bonnet ; tout cela, de bonne qualité, revient à peu près
à 7 livres sterlings par an (175 francs). Legouver-
DANS L’ÜCEAINIE.
nement défend expressément de leur rien allouer en
sus.C
omme les hommes, elles passent par les trois catégories
: travaux forcés, service des particuliers et
ticket of leave ; dans îa dernière position, elles alimentent
les nombreuses maisons de prostitution qui
sont établies à Hobart-Town, à la plus grande satisfaction
des matelots de toutes les nations qui fréquentent
le port. L’ivrognerie est le péché mignon de
ces dames, et leur état à peu près normal.
Comme colonisation et utilité nationale, l’Angleterre
a largement atteint le but qu’elle s’était proposé
; elle possède à l’extrémité du monde, aux antipodes,
de riches établissements qui, en temps de
guerre, pourraient non-seulement se passer de la
métropole, mais lui venir en aide. Sidney, Hobart-
Town , dans leurs eaux profondes, à l’abri des vents,
d’une défense facile contre l’ennemi, peuvent abriter
et approvisionner de fortes escadres q u i, de là, iront
fondre en peu de temps sur TOcéanie et la mer des
Indes. C’est là un magnifique résultat hors de toute
contestation.
Mais, à côté de la question utilitaire, il en existait
une autre non moins grande, non moins be lle , la
question de l’humanité.
A la fin du siècle dernier, beaucoup de bons esprits
, des hommes sages et dévoués à leurs semblables,
axaient pensé qu’en éloignant des yeux du peuple
cette hideuse plaie des bagnes, qu’en déportant
ies malfaiteurs sur des plages lointaines, dans un