
Owares ayant, comme tous les peuples peu civi-
lifés , un goût particulier , dominant 8c défor-
donné pour k s liqueurs fortes , ils ont trouvé le
moyen (qui peut-être leur a été indiqué par les
Portugais lorfque ceux-ci ont voulu s’établir parmi
eux ) de faire fermenter les femences dépourvues
de leur enveloppe écailleufe, 8e d’en extraire une
liqueur très-fpiritueufe, très-forte, 8c qui enivre
aifément, mais qui n’ eft pas tout-à-fait auffi agréable
au goût que celle qui eft extraite directement
de la fève de l’arbre. »
Cet arbre fournit cette fubftance connue fous
le nom de fagou ; mais il n’eft pas le feul : un grand
nombre de palmiers en donnent également en plus
ou moins grande abondance. On retire le fagou
particuliérement de la moelle du tronc, qui eft
plus ou moins tranfparente, blanche & fongueufe,
fuivant l ’âge de l’arbre. Les habitans l’enlèvent
après avoir fendu l’arbre dans fa longueur ; ils
écrafent cette moelle, la mettent dans une efpèce
de cône ou d’entonnoir fait d’écorce d’arbre, af*
fujetti fur un tamis de crin j ils la délaient avec
beaucoup d’eau. Cefluide entraîne, par les trous
du tamis, la portion la plus fine & la plus blanche
de la moelle 5 la partie nbreufe refte fur le tamis.
L ’eau chargée de la partie la plus atténuée de
cette moelle eft reçue dans des pots, & elle y dé-
pofe peu à peu la fécule qui en troubloit la tranf-
parence. On décante l’eau éclaircie, & on paffe
le dépôt à travers des platines perforées, qui lui
donnent la forme de petits grains, fous laquelle le
fagou nous parvient. La couleur rouffe q u jlso f-
frent à leur furface eft due à lJa£tion,du feu fur
lequel on les a fait fécher. Ces grains fe ramollif-
fent 8c deviennent tranfparens dans l ’eau bouillante.
On en forme, avec le lait ou le bouillon,
une forte de potage léger 8c allez agréable, qu’on
a fort recommandé dans la phthifie.
L e fagou eft donc un véritable amidon , auquel
on peut très-bien fubftituer celui de pommes de
terre : fes qualités font très-indépendantes de fa
forme. Quand on veut faire cuire ce fagou, on en met environ une cuillerée à bouche dans un poêlon
, pour le délayer peu à peu dans une ehopine
d’ eau chaude ou de lait $ on place ce poêlon fur
un feu doux j 8c on remue fans difcontinuer pendant
une demi-heure ou environ : on y ajoute du
fucrey des aromates, de l’eau de fleurs d’orang
e , &c.
Dans les îles Moluques, aux Manilles, aux Philippines,
on forme aulïi avec la pâtemolle du fagou
, des pains mollets de demi-pied en carré , &
d’ un, doigt d’épaiffeur. On en attache, en forme
de chapelet, dix ou vingt enfemble, 8c on les
vend ainfi par les rues des villes 8c faubourgs
d’Amboine.
Les habitans de cette contrée font encore un^
efpèce de poudingue, allez agréable pour les con-
valefcens, avec cette pâte encore molle, mélangée
Jde jus de poiflon 8c de fuc de limon, avec
quelques autres aromates.
2. SAgouier farinifère. Sagas far inifera.
Sagas fpinis longiffimis, fpadice maximo , ramis
divergentibus, longijfimis ; fruiïibus ovatis. (N.)
Sagas farinifera. Gærtn. de Fruét. 8c Sem. plant,
vol. 2. pag. 106. tab. 120. fig. 3.
Sagus longifpina. Rumphius , Amboin. vol. 1.
pag. 75.
Metroxylon. Rottb. Nov. Aft. Dan. 2. pag. 52;.
tab. 1 .'
C ’eft un arbre dont le tronc eft court, peu
! éle vé , prefque lifte, couronné à fon fommet par
une touffe de feuilles très-amples, ailées, divisées
en folioles longues, très-étroites, vertes &
glabres à leurs deux faces, très-liffes , aiguës,
‘ armées fur leurs pétioles de très-longues épines,
\ rares, caduques.
La fpathe qui enveloppe les régimes eft grande,
; chargée d’ épines caduques ; le régime très-ample,
• extrêmement rameux dès la bafe; les rameaux di-
vergens, très-longs, de dix à douze pieds, leurs
• divifions longues d’ un pied 8c demi environ, comprimés,
couverts d’écailles Amples , tronquées ,
de deux pouces de lon g, alternativement difti-
quées : de chacune d’elles fort un chaton divari-
qué, cylindrique ,'fêffilê, tomenteux, long de fix
à huit pouces, imbriqué d’ écailles coriaces, nom-
breufes, qui recouvrent entièrement des fleurs fort
petites, nombreufes, dont beaucoup avortent.
Les fleurs, d’après Rottboll, font hermaphnw
dites : leur calice eft divifé en fix découpures,
dont trois intérieures plus longues j elles, renferment
fix étamines non faillanres, les. fi’amens concaves,
élargis à leur bafej les anthères fagittées
8c cônniventes. L’ovaire eft fumonté d’un feul
ftyle dro it, d’ un ftigmate épais. Le friait eft une
noix a fie z groffe, de la forme d’ un oeuf de poule,
couverte d’écailles lui Tantes, imbriquées dufom*
met vers la bafe, coriaces, d'un jaune clair, fou-
vent blanchâtres 8c membraneufes à leurs bords,
prefque triangulaires, marquées extérieurement,
dans leur milieu, d’un fillon longitudinal : elle
renferme une feule femence dure, ovale; caractère
qui rie permettroit pas de réunir cette efpece
aux •calamus, quand bien même il feroit très-certain
que toutes fes fleurs font hermaphrodites.
Cet arbre croît dans les Indes. Son tronc contient
une moelle farineufe, qui eft un aliment très-
fain quand elle eft‘recueillie avant la floraifon.O11
en retire anflî du fagou, ainfi que de beaucoup
d’autres palmiers, T? ( V . f in herb. Jujf.)
^ SAGOUIER bâche. Sagus americana.
Sagus caule excelfo , fubtriangulari; foliisÛabelU-
firmibus, 'longifimisj fruttjbus fubglobofis. ( N. )
Le bâche. Aubl. Guian. Append. 103.
Le cara&è're efftntiel de ce genre eft d’avoir :■
Un calice perfifiant, a cinq divifions ; la carent
obtufe 6’ comprimée ; une goujfe articulée ; les articulations
planes , à une feule femence ; dix étamines
diadelph.es.
Quoique nous n’ayions fur cette belle efpèce de
palmiers que le peu de détails que nous en a donnés
le botanifte Aublet, elle a .tant de rapports
avec le genre dont nous trairons, que nous avons cru devoir le mentionner ici. Nous nous borne-j
rons à ce qu’en.a dit Aublet.
«Le bâche, dit cet auteur, eft le feul palmier
que j'aie rencontré de fon efpèce. Son tronc eft
fort très-dur} fes fibres longitudinales font noires
& fôlides : il s’élève à trente pieds, fur deux pieds
& plus de diamètre ; il eft comme triangulaire.
Ses feuilles font en éventail, d’ une grandeur 8z
d’une largeur confidérables > elles ont cinq pieds
environ de diamètre.
»Les fruits font portés fur un régime très-bran-
chu & fort grand ; ils font de la groffeur d’ une
moyenne pomme 8c rougeâtres : c’eft une coque
mince, lifte, comme verniffée, ferme, couverte
d’écailles qui imitent à peu près celles de la pomme
de pin dans fa jeuneffe.
» Deffous cette coque eft une groffe amande ,
dont la nation des Maiès fait du pain qui fert à
fa nourriture. Le tronc du palmier-bache réfifte à
la hache par fa dureté, il eft employé par ces mêmes
peuples dans la conftruétion de fes carbets :
les feuilles leur fervent à couvrir ces carbets. Le
pétiole des feuilles , qui eft fort long 8c large ,
aplati & ligneux, leur fert pour border les canots,
afin de les agrandir. Ces Maiès tirent des
feuilles tendres un fil très-fin, avec lequel ils fabriquent
des hamacs 8c des pagnes. Cet arbre eft
précieux à caufe de fon utilité. Lorfqu’on vient à
iè perdre dans les déferts, 8c que l’on rencontre
^ces arbres, on fe trouve préfervé de la famine.
Les perroquets font très-friands de fon fruit : tous
les matins ils fe rendent fur ces palmiers : c ’eft
auffi les lieux où les Caraïbes leur tendent des
pièges.».
I Cet arbre croît principalement fur le bord des
rivières, des ruiffeaux, dans les cantons maréca-
8eux de la Guiane. T?
SAINFOIN. Hedyfat •um. Genre de plantes dicotylédones,
à fleurs papillonacées, de la famille
des légumineufes, qui a de grands rapports avec
les oefchinomene, 8c qui comprend aes herbes,
quelques arbuftes exotiques ou indigènes de l’Eu-
rope, dont les feuilles font Amples, ou géminées,
cuternées, ou ailées avec une impaire, munies
. . ftpules réparées des pétioles j les fleurs axil-
Lires ou terminales, folitaires ou paniculées , ou
épis j très-fouvent garnies de bradées.
C a r a c t è r e g é n é r i q u e .
Chaque fleur offre :
i ° . Un calice perfiftant, d’une feule pièce, div
ifé , jufquè vers fon milieu, en cinq découpures
droites, fubulées.
2°. Une corolle papillonacée, dont Xétendard éft
réfléchi, comprimé, ovale-oblong, échatjcré> les
ailes droites, oblongues, très-étroites j la caréné
droite, comprimée, en partie bifide.
3)°. Dix étamines diadelphes, dont les fiîamens
font réunis en un feul corps , ou un filament féparé
des autres > courbés, terminés par des anthères
comprimées, arrondies.
4®. Un ovaire fupérieur, grêle, linéaire, comprimé,
furmonté d’ un ftyle fubulé, incliné., terminé
par un ftigmate très-fimple.
Le fruit eft une gouffe compofée d’articulations
arrondies ou de forme variée, plus bu moins comprimées,
à une feule femence, à une, quelquefois
à deux valves.
Obfervations. Ce genre eft faiblement diftingué
des oefchinamene. Dans ces derniè es , les gouffes
ne doivent être finuées ou échancrées que d’un
feul côté , c’eft-à-dire, que les formes des articulations
ne font prononcées qu’à leur côté extérieur,
tandis que l’intérieur elt droit, linéaire. Ce
caradère s’évanouit par des nuances fi infenfibles,
qu’ il eft impoffible de trouver des limites’ entre
ces deux genres.
Quant à celui dont il eft ici queftion, en y comprenant
les oefchinomene, je ne lui trouve aucun
caractère tranchant. Il faut d’abord eh écarter le
calice 8c la corolle, dont les différences ne peuvent
être ici employées que comme des caractères
fpécifiques. Les calices (ont, les 11ns d’une feulé
pièce, courts, campanules ou prolongés en tube,
à cinq dents plus ou moins courtes, égales ou
inégales j les autres profondément divifées , juf-
qu’ à leur moitié ou jufqu’aux trois quarts, en cinq
découpures profondes, lancéolées, tres-inégalés,
formant quelquefois deux lèvres.
La corolle varie par la forme , & furtout par
la proportion relative de fes pétales. La plus remarquable
eft celle des deux ailes, fouvent très-
courtes, à peine auftï longues ou plus courtes que
le calice, d’autres fais égalant prefque la.rarène.;
l’étendard eft tantôt plus long , tantôt plus coure
que la carène. Il eft donc évident, d’apïès ces 1 D d d *