
On retire des capfulés les femences & tonte la
matière charnue qui les environne : on les êcrafe
avec des pilons de bois, dans des canots, qui.font
des troncs d'arbre creufés : on jette de ie.au def-
fus en quantité fuffifante, pour que la matière y
trempe : on Fy laide pendant fix jours, afin- que
F eau puiffe difi'oudre la fubftance rouge qui eft
adhérente aux femences. On coule enfuite la liqueur
dans un crible du pays, nommé lühickei ou
manaretj puis par trois autres cribles plus fins,
faits de joncs-ou de grofle to ile , dont les trous
font carrés : on laiffe égourter pendant vingt-quatre
heures ce marc, qu’on appelle roucou calé ,
puis on le met de nouveau dans un canot qu’on
a foin de couvrir, & on l’y laiffe fermenter pendant
huit jours, pour que ce qui reftede matière
rouge colorante puiffe plus aifément s’en détacher
& s’extraire. Pour cela on jette un peu de nouvelle
-eau fur la matière > on l’agite jufqù’à ce
qu’elle commence à fe gonfler & à former des
bulles d’a ir , qui crèvent à la furface. Alors on
diminue le feu : on laiife refroidir le roucou jaf-
qu’au lendemain matin ; on le tire de la chaudière,
& on l’étend dans des caiiTes que l’on tâche de
-garantir de la pouffière. Le roucou , féché à l’ombre
par le vent, eft infiniment plus coloré que celui
qu’on expofe au foleil. On a obfervé que plus
on le travaille en grand, plus la couleur en; eft
vive : travaillé en p e tit, il devient noir. Le roucou
eft pur & bien fait quand il fe diflout entièrement
dans l’eau , & qu'il n'y a point de corps
étrangers , erraas ou précipités, comme dans le
rocou gigadaine, qui eft de mauvaïfe qualité, &
plus encore celui qu’on appelle roucou bal, terme
qui fignifie la paille & le blé, parce qu’on s’eft fervi
de vieilles & de nouvelles graines., & qu’on y a
mêlé quelquefois du rouge d’Inde.
Le roucou, pour être de bonne qualité, doit
être couleur de feu , plus v if en dedans qu’en dehors
, doux au toucher, d’ une bonne confiftance,
■ afin qu’ il foit de garde. On donne à cette pâte
-'la forme que l’on v e u t, avant de l’envoyer en
Europe : elle eft ordinairement en pains, enveloppés
dans des feuilles de balifier. A l’égard de
•l’eau rouflatre, elle eft propre à être jetée fur de
nouvelles graines qu’on veut faire tremper.
On peut retirer du roucou une fubftance rouge
beaucoup plus b elle, en fe contentant de frotter
feulement les grains entre les mains, dans de l’eau 5
mais alors on n’en retire qu’ une petite quantité:
d’extrait ou de fécule qui le précipite, & prendj
la forme d’un pain de cire. Rarement on la garde i
-dans cet état, non-feulement parce-qu’ elle devient
trop chère, mais parce qu’on eft dans l’ ufage d ’af-
foiblir fon état trop v i f , qui offenfe la vue, avec
du fantal en poudre : tel eft le roucou que les Indiens
caraïbes & autres aiment avec paffion. Ils le
trempent dans l’huile avant que -de d’employer!
pour fe rougir le corps. Cette efpèce d’ enduit:
•ferme les pores, empêche que l’eau de la mer ne
k fie des. impreflions fur leur corps, fait fuir les
maringouins & mourir les chiques.
On fait deux, récoltes de roucou par an : celle
d'hiver eft la plus abondante. Les ouvriers qui
travaillent à préparer le roucou font incommodés
de maux de tê te , qu’on attribue à l’odeur forte
des femences du roucou , qui eft .encore exaltée
davantage par les infufions & les macérations. La
bette pâte de roucou devient dure en Europe &
perd fon odeur, qui approche de celle de la violette.
Celle de Cayenne eft eftimée la meilleure
& la mieux préparée : les teinturiers s’en fervent
pour mettre en première couleur les laines qu’on
veut teindre en rouge, bleu, jaune, vert, &c.
Il eft peu de couleurs où on ne la faffe entrer. Lé
roucou palfe pour fortifier l’ eftomac & arrêter le
cours de ventre. Lorfque le linge a été taché du
roucou , il eft très-difficile d’en effacer la tache,
furtout quand il y a eu mélange d’huile. Le foleil
eft plus capable de l’emporter que toutes les lef-
fïves, & cette couleur eft fi extenfible, qu’un
morceau de linge taché eft capable de tacher toute
une leffive. Il eft bon d’obferver q ue , quand la
pâte du roucou commence à fermenter, il eft
alors d'une puanteur infupportable. Son odeur
agréable ne fe fait fentir qu’après la fermentation.
(Bom. D ié t )
ROELLE. Roclla. Genre de plantes dicotylédones,
à fleurs complètes, monopétalées, delà
famille des campanulacées , qui a des. rapport*
avec les campanules, & qui comprend des arbuf-
tés ou des herbes exotiques à FEurope, à feuilles
petites, alternes, dont les fleurs font folitaires,
terminales ou axillaires.
Le cara&èrè efîentiel de ce genre eft d’avoir :
Un calice perft fiant, a cinq divifions ; une corollt
irtfundibuliforme, attachée au fommet du calice i
■ dont le limbe efi divifé en cinq découpures j cinq fila-
mens dilatés a leur bafe ÿ un fiigmate bifide y une cap
fuie inférieure 3 a deux loges.
C a r a c t è r e g é n é r i q u e .
Chaque fleur offre :
1®. Un calice fupérieur, d’une feule pièce, turbiné,
perfiftant,. à cinq découpures lancéolées,
quelquefois dentées.
2°. Une corolle monopétale, infundibuliforme
ou campanulée , dont le tube eft plus long que le
calice, inféré à fon orifice, & le limbe partagé en
cinq découpures-ovales.
3°. Cinq étamines, dont les filamens font fabules,
dilatés en forme d’écailles à leur bafe, far*
montés par des,anthères fubulées, conniventes.
4°. Un ovaire inférieur ,, oblong, furmoftté d’un
Prie filiforme, de la longueur des,étamines , ter- miné par deux ftigmates ouverts, oblongs, aplatis. '
Le fruit eft une capfule inférieure, cylindrique,
couronnée par le calice, à deux loges, quelquefois
à une feule lo g e , s’ouvrant à fon fommet par
un trou arrondi : elle renferme des femences petites,
nombreufes, anguleufes.
Obfervations. Ce genre a été primitivement établi
furie roella cilla ta, efpèce unique. Celles que
Fon y a depuis ajoutées, s’écartent plus ou moins
des caractères génériques de la première, remarquable
furtout par les grandes découpures dentées
qui couronnent le fruit. Plufieurs botaniftes
croient qu’il cônviendroit de féparer les autres
efpèces de celles-là, en les rangeant dans un genre
particulier. S’il n’exifte d’autre différence que dans
cette forme particulière du calice , & que les au-
| très parties de la fructification aient le même caractère
, ce feroit à to r t , fans d oute, que Fon
; voudroit féparer des èfpèces qui ont d'ailleurs
tant de reffemblance dans leur port. Leurs feuilles
font très-petites , feffiles, fermes, rapprochées,
réfléchies en dehors ^éparfes, quelquefois pref-
. qu'imbriquées, la plupart ciliées à leurs bords.
Les fleurs, peu apparentes, varient par leur infer-
tion, les unes étant terminales, fafcicuiées5 d’au- •
très, folitaires, axillaires.
E s p è c e s.
1. Roelle ciliée. Roella ciliata. Linn.
Roellafruticulofa, foliis-linearifubulatis, cillatis ;
L mueront reéio; florïbus terminalibus , folitariis. Lam.
; IU.Gener. vol. 2. p. 66. n°. 2576. tab. 123. fig. 1.
Roella foliis ciliatis, mucrone erecio. Linn. $pec.
Plant, vol. 1. pag. 251. — Gærtn. de fruét. & Sem.
; vol. 1. pag. 154. tab- 31. fig. 3. —- Desfontaines ,
Flor, atlant. vol. 1. pag. 182. •
Roella. Hort. Cliffort. 45)2. tab. 35.
Roella foliis lanceolatis , ciliatis y floribus folita-
riis, terminalibus. Thunb. Prodr. 38. — Wiilden.
• Spec. Plant, vol. 1. pag. 918. n°. 1.
Roella foli is linearibus , ciliatis, réélis ; foribus \
feffilibus. Bergius, Plant. Cap. pag. 41. n°. 1.
Campanüla af,ricana, frutefeens, aculeofa j flore vio-
laceo. Commel. Hort. 2. pag. 77. tab. 39.
■ Aculeofa mauritanica , tries, foliis hirfutis, rigi-
dis 3 infeflo mucrone pungenùbus. Pluken. Almag. 8.
tab. 252. fig. 4.
Campanüla a f ricana, humilis, pilofa ; flore exal-
bido , l a n g u i d e Seba. Thefaur. vol. 1. p. 2 c.
tab. 16. fig. y . . \
Petit arbriffeau qui s’élève à peine à la hauteur
de huit à dix pouces , dont les racines font Amples,
flexueufes, cylindriques , garnies de fibres capillaires
j les tiges courtes, droites, glabres, divi-
fées vers leur partie fupérieure en branches ëpar-
fes, touffues, qui fe foudivifent à leur fommet en
rameaux courts, fouvent prolifères, qui fontfeuls
munis de fleurs, garnis de feuilles nombreufes ,
éparfes, fefliles, fort petites, étroites, linéaires,
fubulées, droites, très-entières, un peu carénées,
munies à leurs bords de cils blanchâtres.
Les fleurs font folitaires , fefliles & terminales
fur les plus jeunes rameaux, enveloppées à leur
bafe par plufieurs feuilles femblables aux autres ,~
mais plus grandes. Leur calice eft glabre , divifé
en cinq découpures grandes, lancéolées, mucro-
nées, dentées à leurs bords, chaque dent terminée
par une pointe fétacée, roide, prefqu’épi-
neufe. La corolle eft d’un pourpre violet, infundibuliforme
; fon tube épais , plus court que le calice
; fon limbe partagé en cinq divifions ovales ,
un peu arrondies, terminées par une petite pointe
obtufe. Le ftyle eft velu & de couleur purpurine
vers fon fommet. La capfule eft prefque cylindrique,
couronnée par les découpures du calice ; elle renferme
des femences rudes, petites & anguleufes.
-Cette plante croît dans plufieurs contrées de
l’Afrique , au Cap de Bsnne-Efpérance, dans l’Ethiopie
& la Barbarie, f) ( V . f . in herb. Lam.)
2 .R o e l l epédonculée. Roella pedunculata.Berg.
Roella foliis linearibus , ciliatis , réélis ; floribus
pedunculatis, germinibus longijjimis. BerglUS , ‘Plant.
Capen. pag. 42. n°. 2.
Cette plante reffemble beaucoup au roella ciliata
peut-être n’en eft-eîîe qu’une variété} cependant
elle en diffère par fon port. Ses tiges font
plus élevées, fes fleurs pédonculées, fes capfulés
bien plus longues.
Ses tiges fe divifent en rameaux cylindriques,
pubefeens, garnis de feuilles linéaires, très-étroites,
aigues, éparfes, feffi le s , nombreufes, glabres à
leurs deux faces, munies vers leur bafe , & non
dans toute leur longueur, de cils courts, épineux.
Les fleurs font terminales, prefque folitaires,
quelquefois au nombre de deux, dont les pédoncules
font très - longs à l’extrémité des rameaux,
garnis quelquefois de deux ou trois feuilles} chaque
fleur eft pëdiculée , munie de bradées linéaires ,
aigues, fubulées, ciliées. Leur calice eft divifé à
fon orifice en cinq découpures lancéolées, aiguës,
ciliées : l’ovaire eft cylindrique, beaucoup plus
long que le calice.
Cette plante croît au Cap de Bonne-Efpérance. fy
( Defcript. ex Berg. )
Obfervations. C e que Bergius regarde comme
! des pédoncules, nous paroît être le prolongement