
Rjfe s A F
Icon. fuperior. — Camer. Epitom. $j. Icon. — I
Fufchf. Hift. 441. Icon. — Matthiol. Comment.71. I
Icon. — H.Eyft.Æft. 3. pag. 16. fie. 4 .— Miller, ,
Icon. t a b .m i .
. Crocus autumnoelis 3fativus. Motif. O.XQH. Hift. Z.
pag. 335. n°. 4. tab. 2. fig.'i.
Crocus facivus Matthioli. D ale ch. Hift. 2. pag.
1532. Icon.
Le Sa f r a n . Régnault, Bot. Icon.
Efpèce intéreffante par la beauté de Tes fleurs,
& furtout par les propriétés économiques & médicinales,
que l’ on cultive en grand dans beaucoup
de pays, & qui fe diftingue des autres efpèce s par
l'époque dfe la floraifon ; du fafran d'automne par
la longueur du tube de la corolle , par fa couleur
purpurine, par fes feuilles plus étroites, roulées à
leurs bords.
Ses racines font formées par une bulbe arrondie,
de la grofleur d'une noifettë , un peu comprimée,
revêtue d ’une pellicule brune & fibreufe : il en
fort plu fleurs fibres longues, & qui s'enfoncent af-
fez profondément d'ans la terre. Il s'élève immédiatement
de ces racines des feuilles longues de
fept à huit pouces ,_très-étroites, d'un vert-foncé,
un peu roulées à leurs bords, fubulées, aiguës,
traverfées par une nervure blanche. Du milieu de
ces feuilles fort une hampe courte, qui fu-pporte
une grande fleur d’un pourpre-clair, enveloppée à
fa partie inférieure par une fpathe très-mince,
blanchâtre , d'une feule pièce , qu'il faut diftin-
guer des membranes écailleufes q.ui entourent également
les feuilles à leur bafe.
La corolle eft compofée d’un tube grêle, étroit,
fort long , rer fié à fa partie fupérieuFe, où il fe
.dilate en un limbedivifé-en fîx découpures.droites,
ovales, oblongu.es, un peu obtufes, bien plus
courtes que le tube. Les étamines font plus courtes
que le piftil j elles ont des anthères jaunâtres ,
alor.gées, plus courtes que le limbe. L’ovaire eft
arrondi, furmonté d'un ftyle grêle, blanchâtre,
qui fe divife à fon foramet en trois ftigmates odo-
•rans, médiocrement alongés, plus longs que les
étamines, d'une belle couleur jaune-doré, incifés
& renflés à leur Commet. Il leur fnceède une cap-
fule ovale , oblongue, acuminée, à trois côtés,, à
trois valves, à trois loges, dans lefquelles font
- renfermées des fèmences arrondies.
Cette plante croit naturellement dans l'Orient,
l’Italie, la Sicile. On la cultive en grand dans h
plupart des contrées méridionales de l'Europe ; en
France, dans plufieurs dépa-rte-mens, principalement
dans le cj-devant Gatinois. Scs fleurs ne fe
montrent que dans l'automne ; elles paroiflent
feules, durent peu : après leur chute, les feuilles
fe montrent & fubfiftent une grande partie de l'hiver.
(ff . v.);
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| On ne fe fert que des ftigmates du fafran qui e(1
; portent le nom , & pour lefquels feuls on le cuf
| tive. Ces ftigmaces deflechés entrent, commeaf.
fai fon ne ment, dans un grand nombre d’alijnens
qu’ils colorent : on les fait entrer dans les crèmes
les paftillçs les gâteaux de riz , de vermicel de
pomme de terre, Scc. ainfi que dans cette liqueur
que l'on nomme efcubac. Le fafran fournit aux teinturiers
une belle couleur jaune, mais elle dure peu
& coûte très- cher : les peintres en font ufagepour
laver leurs plans : les bulbes fourniflent de l’a-
. midoa.
Maisl’ ufage le plus habituel du fafran .confite
dans fon emploi en médecine. Les médecins font
| le plus grand éloge de fes propriétés. Elles réfîdenc
; principalement dans te principe fubtil & pénétrant
; qui s'en dégage , & qui agit puiflamment fur H
j nerfs & fur le cerveau , qu'il ébranle à la manière
des narcotiques : de là vient ce. fommeil profond,
;■ léthargique & même mortel qu’il produit fur les
; performes qui réfpirent trop long-tems un air im-
! prégné de fes parties odorantes ; la gaîté & l'en-
| jouement qu’ il procure à ceux qui en ufent fobrs-
ment ; la, folie , les ris immodérés convnjfifs
qu’il excjte dans ceux qui §n abufent. On ne doit
donc en ufer que modérément & à propos : une
trop grande doie produiroit des accjdens très-fo
neftes. Quelques auteurs aflyrent que trois gros
pourroient occaficnner la mort ; cependant fon
ufage eft fi familier aux Polonais, qu'ils le mêlent
Couvent jufqu'à la dofe d’une once dans leurs aj:-
mens ; mais alors le fafran devient pour eux ce que
l'opium eft pour les Turcs : un ufage habituel &
gradué en émoufie l’aélivité*
Le fafran eft excitant & fort chaud ; il n'agit pas
feulement fur les nerfs ; il porte encore fon aftion
fur Les liqueurs & toutes Les parties foljdes des
corps animés ; il excite un orgafme général , accélère
la circulation , follicite les fécrétions, porte
fortement les fueuis à la peau, rétablit le flux
menftruel, hâte l'accouchement & l'expulfioo de
l'arrière-faix, &c. On peut l'employer dans lésât-
fetStions. hypocondriaques & hyftétiques, les maladies
venteufes; contte'les douleurs opiniâtres,
les foiblefles d’eftomae, l’infomnie, la toux, Ls
fuffocat-ions, les fpafmes , la cardialgie, la dyfler-
terie, & c, ; mais les per.fon,nes maigres, bilieufes
& pléthoriques ne doivent en ufer qu’avec beaucoup
de réferve. Sa dofe en fubftance eft depuis
un grain jufqu'à cinq. On J'emploie dan« les cata-
plafmes réfolutifs : on le fait entrer dans les colyres
, furtout pour préferver les ye.ux des fuites de
la petite vérole ; on en prépare un firop ; il ^lltre
! au (fi dans la thériaque , dans, la confection d’hyacinthe
,le s pillufes dorées , &c.
* La culture, la récolte & les maladies fîngulieres
du fafran pré fente n t de s faits intére flans qui nous
ont été fournis, par Duhamel & plufieurs
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cultivateurs. Pour cultiver le fafran, on choifit.un
terrain bien uni & qu’on a laiflé repofer pendant
deux ans ; on le laboure vers le fécond mois de
printems, en traçant des filions très-ferrés & très-
profonds 5 on le fume bien & on l'entoure d’une
haie fort épaiffe pour écarter les beftiaux & principalement
les lièvres. Au commencement de l’été,
on plante les bulbes dans des frôus à trois pouces
de diftance les uns des autres. Dès le premier mois
de l’automne on farcie les mauvaifes herbes par un
beau tems, de peur d’oflfenfer les oignons, & avec
h pioche on donne un troifième labour. Les terres
dans lefquelles le fafran fe plaît le mieux font les
terres noires, légères, un peu fabloneufes; les
rouffàtres.
On donne le nom de fafraniere au champ dans
lequel on cultive le fafran. Une fafranière bien
ménagée peut durer trois ans : on prétend même
qu’elle peut durer jufqu’à neuf, mais il eft plus
avantageux de lever les oignons dè terre après
leurs trois années de production. On les place dans
un endroit fec, & qn ne les replante ras dans la
même terre; ce qui l’uferoit trop. File a befoin
avant,d’être bien réparée & fufffifamment amendée.
La première année un arpent produit au.plus
quatre livres de fafran fec ; mais à la féconde &: à
la troifième il en donne jufqu’ à vingt. Quelques
cultivateurs partagent en quatre parties le terrain
qu’ils veulent mettre en fafran, afin de faire plus
commodément leur récolte , parce qu’une partie
fleurit pendant qu’ ils dépouillent l’autre.
Les fleurs du fafran fe montrent plus tôt ou plus
tard, fuivant que les automnes font fèches ou humides,
chaudes ou froides. Quand , au commencement
de l’automne, il furvient des pluies douces,
& qu’il s’y joint un air chaud , les fleurs paroiflent
avec une abondance extraordinaire : tous
les matins les champs femblent couverts d ’un beau
tapis gris-de-lin ; c’eft alors que les payfans n’ont
de reposai jour ni nuit; mais lorfqu’ il furvient des
pluies & du vent., on en perd beaucoup. « Je me
fouviensqu’une année, dit M. Duhamel, il fur-
vmt de fortes gelées avant que les premières fleurs
enflent été épluchées, & que l’on fut près de
quinze jours fans en voir par oit re de nouvelles. On
croyoit que la récolte étoit finie; mais le tems s’étant
adouci, les fleurs reparurent les unes après les
autres. » Ordinairement la récolte du fafran dure
trois femainës ou un mois. Dans le fort de la récolte
on recueille les fleurs foir matin , avant
qu elles foient épanouies' : celles du mari» font
toujours plus fermes-, car il paroît que le fafran
croît plus pendant la nuit que pendant le jour.
Lorfque les fleurs font tranfportéesà la mai Ton ^
/ s femmes féparent adroitement le piftil de la
eur, évitant de le couper ni-trop haut ni trop
'as, afin de ne pointlaifler-de b l a n c ,d e nepoint
couper non plus au deiïus .de la divifion des flig-?
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mates. On diflingue à ce petit bout blanc, lorf-
qu’ilen refte, le vrai fafran d avec le fafranum que
les payfans y mêlent quelquefois. Les acheteurs
redoutent furtout de trouver dans le fafran des
fragmens de pétales , parce que ces parties qui fe
moifilfent lui communiquent une mauvaife odeur.
Dans le tems de la récolte on voit tranfporter
dans les villes & villages voifins, où on ne recueille
point de fafran, des charretées de fafran à éplucher.
A mefure qu’on l’épluche, il faut le fa re.
fécher à un feu très-doux. Pour cet effet, dans le
ci-devant Gâtinois, on le met fur des tamis de crin
fufpendus, au deffous defquels on place de la
braife : la beauté du fafran dépend de la manière
dont il eft defleché. Quand le fafran eft bien fec
on le ferre dans du papier & dans des boîtes. Il faut
cinq livres de fafran vert pour en faire une livrede
fec. Quand les .payfans font pour le vendre, ils
mettent leurs boîtes à la cave pour en augmenter
le poids. Le prix du fafran étoit fort cher autrefois
: on le vendoir jufqu’à 60 francs la livre.; il eft
aujourd'hui diminué d'environ deux tiers.
On diftingue trois maladies principales & fort
fîngulières qui attaquent les bulbes du fafran , que
l’on nomme !efaujfet, le tacon & la mort.
Le fauffet eft une forte de production monf-
t'ueufe , en forme de navet, qui arrête la végétation
de la jeune bulbe , dont elle s’approprie la
fubftance : cette maladie devient en conféquence
un obftacle à leur multiplication; mais on peut remédier
à ce mal par l'amputation, lorfqu’on lève
les pied« au bout de trois ans pour en féparer les
bulbes.
Le tacon eü une carie qui attaque le corps même
de la bulbe, & qui ne fe manifelte pas fur fes enveloppes.
Les bulbes font plus fujètes à cette maladie
dans les terres rouffatres. On enlève la partie cariée
lorfque cette carie n'a pas pénétré trop avant.
La mort s’annonce par des fymptômes bien fin-
guliers; elle eft, à l’égard de plufieurs plantes, ce
que la pelle eft aux hommes & aux autres animaux.
Elle attaque d’abord les enveloppes, qu’eile
rend violettes & hériffées de petits filamens ; elle
pénètre enfuite jufque dans la bulbe qu’eile fait
périr. On s’apperçoit aifément du défordrequ’elle
y ca-ufe par l’état des feuilles qui jauni fient & fe
deffèohent.
Dès qu’une bulbe eft attaquée de cette maladie,
elle devient contagieufe,pour les bulbes voifines :
cette contagion fe communiquant de proche en.
proche , elle fait périt toutes les bulbes dans un
efpacc circulaire;, dont la première bulbe attaquée
eft 1 e centre & en même tems le foyer. Si l'on
plante par mégarde une bulbe malade dans un
champ fain, la maladie s'y établit en peu de tems,
& elle y occalionne les mêmes .ravages que nous,
i venons de rapporter ijune,foyl.e: pellée de terre
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