téfè V o y â g e À g L e v a n t j "
berab, autant étoit avare un autre Marchant
T u rc , qui venoit aufti tous les jours au logis
du ConfuL IIpalToit pour être Ix riche, qu’on
no pouvoir eftimer fon.bien à quelques tonnes
d’or près, 6t cependant ile toit d ’une ava-,
ricè Ü ford-idea qu’il fe refufcdt jufqu’àun ordinaire
railbnnable.,Il arriv a, pendant que je
•demeurai« au Caire, que oet homme ayant
quelqueineommodité,un Médecin Venitien^
à qui le Conful donnoit auiïi fa table, lu i or-*
donna quelque remede. La dépenfe n ’alloic
peut-être qu’à, quinze ou feizefols jmais quand
le vilain entendit parler de cette fournie ^ il
pâlit de frayeur,, & dit qu’il croiroit faire un
jrrand péché s’il dépenfoit à une fois une li
grande fomme pour la confervation de fon
corps,. Ce qu’il y a de furprenanr encel aj c’eft
qu’entre lef Turcs il y a pluiîeurs perfonnes
qui £ont de même fentiment j ôt qui croyent
que quand ils Meurent avec de fi grandes ri-
.•chelTes , 8c qu’ils ne s’en font jamais fervi , ils
vont infailliblement en Paradis en fortant de
ce monde. Tant il eft vray quel’avarice trou-*
ve partout des prétextes mais iln ’eft pas ne-^
ceflairé d’aller en Egypte pour en avoir des
exemples.
La charité envers lés pauvres étoit autrefois
fort commune en ce païs ; mais comme
toutes les bonnes coutumes £e perdent fouvent
É*r Egypte , Sy r i e , & c.
vent avec le tems, celle-cy eft aulli devenue
bien plus ra re ,. 8c elle ne fe trouve plus guéres
parmi eux.
Hors delà ville du Caire, décote qui eft vis-
à-vis du Château, il y a un Bourg appelle Car
raffe% fameux pour être le lieu de la lépulture.
de plufîeurs parents die M ah omet, 8c d’un
nombre confidétable de leurs Santons. Lors
que l’Egypte fleuriflbic, fous la domination
des Mamelucs de Circaftie,. on comptoit dans
ce Bourg „ qu’on p eut dire n’être proprement
qu’un grand Cemetiere , plus de trois cents
&ixantæ,.tant Tombeaux que Mofquées des il-
luftres Mahometans. Ces Mofquées étoient
Commeautant d’Hôpitaux., tous bien rentez,
pour l’entretien des Pauvres & des Pèlerins
qui aHoient vifiter ce lieudedévotion. G’eft.
pourquoy un Pelerin qui venoit anCaire pou-
voit demeurer là un an fans qu’il lui en coûtât
rien , pourvu feulement qu’il allât tous les.
jours s’arrêter dans une. des Mofquées de ce
Cemetiere, où on lui donnoit à manger & à
boire pour tout ce jour-là.. Mais depuis que
les Turcs fê furent: rendus maîtres de l’Egyr
pte fous Sultan Selim, 8c qu’ils en eurent chaf?
ié les Sultans d5e Circaftiel’an 912,, de l’Egi-
re ,;ou 1517. de laNaiffance de Jefus-Chrift.,
tousces Tombeaux 6c ces Mofquées font tom^
bez en. ruine parce que les revenus en ont