le plaisir que leur fit ma parole engagee d aller
les voir bientôt, je pus juger qu’ils ne
comptoient pas infiniment sur mes grosses
tarières et sur le fer de mes roues.
Mais, à mesure que je les comblois d’amitié
et de promesses, je v o y ois la vengeance
éclater dans leurs regards, et qu’ils fondoient
sur moi leur unique salut ; ils se parloient,
se pressoient les uns sur les autres, et me
montraient assez par leurs gestes la haute
opinion qu’ils avoient conçue de mes forces
et de mon empressement à les servir* Le noin
du féroce habitant de Bruvntjes-Hoogte étoit
sans cesse à leur bouche ; 1 un de ces Caffres
se frapp'oit la tête de désespoir et de rage,
en me racontant qu’entr’autres victimes, sa
femme enceinte et deux enfans avoient été
égorgés de la propre main de ce colon , et
que la soif du sang portoit ce tigre au crime
pour le plaisir seul de le commettre. Quelque
révoltante que paraîtra l’anecdote suivante
, je la place ici comme ils me la racontèrent,
et comme on me l’a depuis vingt-fois
certifiée.
Dans un moment où les colonies et les
Caffres pacifiés vivoient en bonne intelligence
, et n’avoient plus lieu de se craindre
E N A f r i q u e . i 7g
et de se persécuter, le ; tigre de Bruyntjes-
Hoogte que cette harmonie déconcertait, et
qui ne pouvait se plaire qu’au sein du çqra
nage et des meurtres, l ’espoir deramb
mer les étincelles c|e la guerre et de faire rç-,
naître d’aneiennes querelles, imagina dose
procurer de, la ville quelques canons de fu-?
sil qui n etoient plus bons que comme vieux
fer j g trouva facilement a les échanger ayçQ
les Caffres qui en qnt toujours besoin; lq
marche conclu avant de livre r pes panons il
en eqcloue les luîUiereS, met dans chacun
double charge 4© poudre, les emplit en 01^
tre de mitrailles et de morceaux de fep qu’il
y fait entrer de forçp jusqu’à la bouche; les
malheureux sauyages qui nç connaissaient
larme a feu que par ses, funestes effets ef
nullement par son mécanisme, emportent
che? eqx eps canons et se disposent bientôt
aies façonner pour en faire des sagayes ; les
feux sont allumés; op y dépose les fatals canons
, ils s échauffent , }a poudre s’embrase
et produit une détonation épouvantable qui
eparpille dans un moment l ’immense brasier,
les instrumens, les hommes, et ya en
estropier m grand nombre à des distances
éloignées ; un d’entre ceux qui me citaient cet
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