conduite secondoit à merveille la droiture
et les affections, de mon coeur ; je me serois
fait même un scrupule d’accepter quelques
bestiaux que les Caffres m’offrirent en échan-
ge d’une quantité de verroterie et de quincaillerie,
que je leur distribuai au moment
de leur départ.
J’avois ardemment souhaité que le jeune
Caffre restât avec moi ; il ne me fut pas plus
possible de le séduire, qu’il ne l’avoit été à
ses camarades de m’ébranler pour obtenir
mon fer : ni mes présens ni mes promesses
de le rendre à lui-même, s’il ne se plaisoit
point avec moi, ne purent rien sur lui* il
opposoit à toutes mes sollicitations une trop
forte résistance pour que je pusse espérer
d’en rien obtenir, cc Je connois , me disoit-il,
» trop bien les blancs pour më fier à eux ; ils
» nous ont fait et nous feront toujours trop
» de mal : si j ’étois assez simple pour vous
» su iv re , une fois réduit en esclavage, j ’au-
» rois beau réclamer vos promesses, il ne me
» seroit plus permis de revoir mon pays ».
I l craignoit, d’après les préjugés raisonnables
de sa nation, qui dans des temps de paix
avoit quelquefois fréquenté le Bruyntjes-
Hoogte, d’être traité comme les colons qui
habitent cette contrée, en agissent effectivement
avec leurs esclaves 5 et quand par
attachement pour moi il se Seroit livré de
bonne grâce et auroit consenti de me suivre*
il n’étoit point assuré, disoit-il, que je fusse
toujours maître de le défendre et de le renvoyer.
Je fis mille efforts pour détruire sa
prévention, et lui dis qu’il ne falloit pas
confondre tous les Hollandais avec ces colons
sanguinaires et perfides • qu’il étoit à
même de juger si les hommes que j ’avois à
mon service étoient malheureux et en droit
de se plaindre* que tous pouvoient user de
leur liberté et me quitter à l ’instant. Ce jeune
homme m’étonna par sa fermeté , et n’en fut
que plus obstiné dans son refus. Je renonçai
à le solliciter davantage.
Nos chasses continuelles et les petites
altercations survenues dans mon camp,
avoient bien interrompu nos conversations’
familières et paisibles avec lès Caffres, mais
elles ne m’avoient pas fait entièrement négliger
le soin de mon instruction ; j’y rev e -
nois de temps en temps 3 ils s’y prenoient
avec cette cordialité que leur avoit inspirée la
reconnoissance pour mes bienfaits : la nouvelle
de leur départ me rendit encore plus
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