l ’abattit. Les camarades d’Amiroo de. retour
à la horde, lui avoient bien dit que je pou-1
vois tirer plusieurs coups de suite ; mais,
jugeant tout, naturellement de mon arme
par les siennes , il ne pouvoit croire qu’on
pût blesser deux fois avec la même fièche
décochée ; il fut donc étrangement surpris,
d’entendre mon second coup, et d e v o ir
l’animal abattu.. I l aurpit bien souhaité ,,
disoit-il, posséder une arme pareille , pour
se battre avec les Caffres 3 il formoit ce voeu
d’un air et d’un ton à me faire présumer que,
l ’homme, s’il n’est pas le plus fort des animaux
, eh est né le plus noble et le plus
courageux. H me demanda pourquoi les colons
n’avoient point de fusils semblables ;
cette question me parut pleine de sens : quoi
qu’il en soit, il me fut impossible d’y ré-
pondre. Non-seulement les colons n ’en pos-
sédoient aucun en effet, mais même, avant
mon arrivée , beaucoup d’entr’eux n’en
a v o ie n t jamais vuV,mt dans toutes les, habitations
éloignées du Cap , on parloit (le mou
fusil comme d’une merveille, une curiosité
sans exemple, et jamais je n’ai même pu ob-
tenir d’un de ces colons d’essayer de chasse^
avec un de mes fusils à deux coups, quoi^
qu’ils me vissent journellement ne m’en
point servir d’autres, à moins que je ne voulusse
tirer à balle sur les grandes gazelles :
cas où les fusils à Un coup sont en effet préférables
pour la justesse de la mire.
Au milieu de nos conversations, j ’avois
cru m’appercevoir qu’Amiroo imaginoit
qu’il m’étoit possible de tirer indéfiniment à
ma volonté, sans être obligé de recharger
mon arme 3 j’en fus convaincu par la question
embarrassante qu’il me fit bientôt. U n
milan passa sur nos têtes 3 je lui envoyai mes
deux coups : il fit seulement un crochet, et
continua sa route, Amiroo me demanda
pourquoi je ne tirois pas jusqu’à ce. que je
l’eusse tué j je n’eus d’autre réponse à lui
faire, sinon que l’oiseau étoit trop commun,
et que je 11e m’en souciois pas, que tant de
bruit d’ailleurs pouvoit en écarter d’autres,
dontj’étois plus curieux 3 par ce détour tout
mal-adroit, j’évitois dé lui expliquer ce qu’il
étoit prudent qu’il ignorât toujours, et
j ’augmentois le crédit et l’idée de supériorité
qu’imprime par-tout un blanc à toute espèce
de sauvage.
Ma chasse fut assez heureuse. Entr’autres
pièces, je tuai un coucou q u i, dans ce genre,