
ni dans la disposition d’entreprendre un si
long voyage, Cette déclaration les rassura.
Ces pauvres gens étoient trop malheureux
pour ne pas exciter ma pitié ; jamais les
Caffres n’avoient été molestés comme ils
l ’étoient alors. Outre les pertes en hommes
et en bestiaux qu’ils avoient essuyées de la
part des blancs, ils en faisoient encore journellement
du côté des Tamboukis,'. nation
voisine q u i, profitant de leur situation critique
, se répandoit dans plusieurs cantons
de la Caffrerie, égorgeoit tout ce qui
s offrait a sa rencontre. Ainsi, pressés des
deux côtés par cette d iv e r s io n le s Caffres
manquant de munitions de guerre, et hors
d état de se defendre, bàttoient en retraite
le plus qu’il leur étoit possible, et s’enfon-
çoient au plus loin Vers le nord, pour éviter
deux ennemis auxquels ils ne pou voient
résister. Un troisième non moins redoutable,
le Bossisman, les pilloit et les massacrait
par-tout où il les rencontrait.
J’étois étonné, d’après ce que m’avoiênt
appris ces gens, qu’ils se fussent si fort éloignes
de leurs hordes ; qu’ils errassent à
1 aventure, sans trop savoir où porter leurs
pas; ils me dirent qu’au moment de la quemière
incursion des blancs , on avoit fait
refluer précipitamment et pêle-mêle tous les
troupeaux, soit du côté de la mer, soit dans
d’autres endroits enfoncés de la Caffrerie ;
niais que n’entendant plus parler d’hostilités
nouvelles, ils avoient risqué de quitter leurs
hordes , et d’aller reconnoître et ramener les
bestiaux dispersés à l’aventure, Us en avoient
en effet une trentaine avec eux ; lorsque je
leur parlai des feux que nous avions apper-
çus pendant la n u it , ils m’assurèrent que
c’étoient les leurs ; mais qu’ils n’avoient
point vu les miens, qui les auroient fort inquiétés,
Je les questionnai aussi sur le navire
naufragé : ils ne firent que me répéter ce
que m’avoient appris les autres ; c’est-à-dire
que ce navire avoit effectivement péri au-
dessus des côtes de la Caffrerie. D ’après ces
indices, je jugeois que ce malheureux événement
étoit arrivé au-delà du pays des
Tamboukis ; à la hauteur de Madagascar,
vers le canal de Mosambique; ils ajoutoient
que, sans savoir les difficultés qu’on pouvoit
rencontrer après leurs limites, il falloit,
entr’autres riviè re s , en franchir une trop
large pour la traverser à la nâge, ou bien
remonter beaucoup au nord pour la trouver