sembloit me contraindre de les chercher
ailleurs.
Ce fut chez ces deux nègres que je mangeai
du pain pour la première fois depuis
un an ; j’en avois tout-à-fait perdu le goût.
Jen’avois compté m’arrêter ici qu’une journée
tout au plus, j’y passai trois jours : il
nous restoit encore bien du pays à parcour
ir , quelques montagnes énormes a traverser
, de grandes difficultés a vaincre dans ce
désert duCamdebo, dont l’aspect vraiment
imposant n’offre par-tout, au lieu de la verdure
et des jardins si naturels deFampoen—
K ra a l, qu’une face tantôt gr ise , tantôt rougeâtre
et jaune, des rochers, du sable, des
cailloux. En me rapprochant des habitations,
je courois moins de risque5 en tenant a mes
idées, je me promettois plus de jouissances.
Ainsi donc, si j’en excepte les lieux ou je
vendis de m’arrêter, je suivis mon plan avec
autant de constance pour le retour que pour
le départ ; mais je profitai du hasard qui
m’avait fait tomber chez les deux frères ,
pour pourvoir à la subsistance dé mon
monde, et je pris mes précautions. Ils me
firent une forte provision de biscuit ; je reconnus
ce service essentiel, en leur donnant
pour échange de la poudre, du plomb et des
pierres à fusil: tous objets précieux qui leur
manquoient depuis long-temps, malgré le
besoin indispensable qu’en a toujours une
habitation, soit pour défendre ses troupeaux
, soit pour repousser les Bossismans.
ils m auroient tout aecordé, à leur tour, en
reconnoissance d’un aussi grand bienfait.
Le 19, a quatre heures du soir, je repris
ma route : le soleil le plus ardent nous dévora
pendant deux jours. Ntms errâmes
sans trouver une goutte d’eau ^ n eut recours
aux jarres que j ’avois fait emplir chez
les frères nègres, et nous fûmes réduits à la
ration, comme cela nous étoit plus d’une fois
arrivé.
De 2 j , après avoir traversé le lit du Kriga
qui étoit à sec, et que pous avions déjà passé
la veille , je rencontrai deux habitans du
Camdebo qui revenoient du Cap etfaisoient
route pour leur demeure. Depuis plus d’un
an , je n’avois eu de nouvelles de cette ville
et de mes connoissances. Je fus enchanté
d apprendre qu’avec les secours de la France
le Cap avoit été sauvé de toute invasion de
la part des Anglais, et que la colonie étoit
demeurée sous la domination hollandaise.
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