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ensemble, on puisse les prendre pour üii
peuple de bègues. De toutes ces assertions;
qui se heurtent et se contredisent ; on est
nécessairement conduit à penser qu’aucun
des voyageurs qui ont parlé du langage
hottentot, n’y a fait une attention assez sérieuse
pour en donner une idée nette et
précise, et que par conséquent, sans qüeje
pénètre les motifs de leuif qpiorance profonde,
ils se sont trompés avec autant de
bonne-foi qu’ils nous trompent nous-
mêmes.
Cette langue, malgré sa singularité et là
difficulté de sa prononciation ; n’est pas si
rebutante qu’elle le paroît d’abord; elle s’ap-
prend avec de la persévérance. J’ai connu
des colons qui la parloient couramment, et
je suis parvenu moi-même à me faire entendre
en peu de temps; elle est en général
très-difficile pour tout Européen, mais plus
encore pour nn Français que pour un Hollandais,
un Allemand, etc. attendu que F u ,
F h et le g ne se prononcent pas autrement
que dans ces deux dernières langues, c’est-
à-dire l’u par Fou, et les deux autres lettres
par des expirations auxquelles le gosier français
n’est pas fait, et qu’il saisit avec peine.
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. De tous les vocabulaires publiés dans dif-
férens ouvrages, il n’en est pas un dont on
puisse comprendre un seul mot; c’est en
vain qn’on voudrait en faire usage; on ne
serait point entendu, et jamais un Hottentot
ne soupçonnerait même que ce fût sa langue
qu on lui parlai. Il semble qu’on se soit
plu, dans tous ces vocabulaires, à retrancher
le seul caractère, qui souvent fait toute
Ja signification d’un mot ; on n’y a fait nulle
mention des différens clappemens du la langue,
signes indispensables qui précèdent ou
séparent les mots, «et sans lesquels ils n’ont
aucun sens clair et précis,
Ces clappemens sont de trois espèces bien "
distinctes ; le premier que je désigne ainsi (a) J
celui dont on fait le plus d’usage, le plus,
simple, le plus doux, et le plus facile à exécuter
, s’opère en appuyant la langue sur le
palais contre les dents incisives, Ja bouche
étant fermée ; c’est alors que détachant la
langue avec vitesse en même temps qu’on
ouvre là bouche, ce clappement se fait sentit:
; ce n’est rien autre chose que ce petit
bruit qui nous est assez familier, lorsqu’ob-
sédés par un ennuyeux, nous voulons témoigner,
sans parler, qu’il nous impatiente.