
ne me lassois point d’admirer ces beaux
lieux. • '
Toütes les idées chimériques et .romanesque
» qui. m’«.voient bercé, tous ces déplaisirs
dont je nourrissois mon coeur en quittant
les sauvages , commençoient enfin à se ralentir
, et la raison reprenant le dessus me
faisoit assez connoître que , n’étant point né
pour cette vie errante et précaire , j’avois
d’autres obligations à remplir, d’autres humains
à chérir. Déjà je souriois aux divers
objets dont l’image me retraçoit mes anciens
plaisir» et mes habitudes ; Fairiitié sur-tout,
revetuè de toutes ses grâces, et telle qu’elle
doit plaire aux ames délicates et sensibles,
sembloit m’appeler de loin, et me tendre les
bras. D’autres sentimens, peut-être, v c -
noient à son appui pour dérider mon fron t,
èt presser de plus en plus ma marche. Certain;
comme )e Favois appris, que je trouverais
M. Boers bien portant au Cap, chaque
pas que je faisois vers la ville me donnoit
des élans d’impatience que mes compagnons
partageoient bien sincèrement avec moi. Je
ne pouvois me savoir si près sans desirer de
voir disparoître derrière moi le chemin qui
de voit iiFy conduire ;. je n’étois plus occupé
que du plaisir de retrouver des amis , mais
sur-tout d’embrasser celui que mon coeur
distinguoit à tant de titres.
Le 26, après avoir échappé , si je puis
m’exprimer ainsi , à dix habitations qui se
trouvoient sur ma route , je traversai la
Breede-Rivier ( Rivière large) une lieue
plus loin , le Jd^ a a ter-a l ( Chute d’eau) ;
•ensuite quelques habitations qui sans doute
m’attendoient: au passage depuis long-temps;
car les habitans, voyant que je n’arrêtois
point, prirent le parti de me. suivre comme
une bête curieuse, et ne me quittèrent que
lorsqu’ils m’eurent considéré à leur aise. Je
passai le Rooye-Sand-Kloof ( la Vallée du
Sable rouge ) , le Klein-Berg-Rivier ( la petite
rivière des Montagnes). Le lendemain
27, arrivé au Swart-Land , je fis seller mes
chevaux, qui depuis long-temps 11e me ser-
voient point ; et , suivi de mon fidèle Klaas,
laissant les curieux autour de mes chariots
et de mes équipages, je pris les devans, et
me fis un plaisir d’arriver le soir même chez
mon ancien hôte, le bon Slaber, qui m’avoit
si noblement accueilli deux ans, auparavant,
lors de mon affreux désastre à la baie Sal-
danha.