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» aussi le sauvage qui chante ou qui danse
» est-il toujours heureux ».
J’ai fait remarquer que les Hottentots ne
s’assemblent guère que la nuit pour se divertir;
les occupations journalières ne leur laissent
point d’autre temps. Chacun a ses devoirs
à remplir. I l faut surveiller sans cesse
les troupeaux épars dans les champs, non-
seulement pour empêcher qu’ils ne s’égarent,
mais pour les garantir de l ’atteinte des
animaux carnassiers qui les épient continuellement
; il faut les panser et les traire
deux fois par jour ; il faut travailler aux
nattes, amasser le bois sec pour les feux du
soir ; il faut pourvoir à sa subsistance, et
chercher des racines : ces dernières occupar
tions appartiennent particulièrement aux
femmes. Les hommes , de leur côté, vont à
la chasse, font la revue des. pièges qu’il s, ont
tendus en divers endroits,, fabriquent les
flèches et tous les instrumens dont ils ont
besoin ; et quoique ces instrumens et tous,
les ouvrages de leurs mains soient en général
assez mal tournés; et grossiers, ils exigent
de leur part beaucoup, de fçmps et de
peines, parce qu’ils sont privés d’une foule
d’outils si* nécessaires pour abréger le tra-
E n A f r i q u e . i og
vail ; et toujours l’adresse chez eux est bien
moins admirable que la patience.
I l seroit étonnant que ces peuples, que
j’ai si souvent fréquentés, avec lesquels j ’ai
vécu si long-temps, eussent été assez adroits
ou assez faux pour se cacher de moi, au
point que je ne me fusse jamais apperçu, ni
parleurs discours, n i dans leur pratique de
v iv r e , d’aucun signe on d’aucun acte de.
superstition, Je me garderai bien de donner
comme des usages religieux certaines privations
qu’ils s’imposent eux-mêmes, et qui
paraissent si naturelles et si simples quand
011 s est donne la peine de les approfondir ;
par exemple, ils ne mangent presque jamais
du lièvre n i delà gazelle, nommée dwyJcers;
le lièvre est à leurs y eu x un animal informe
qui les dégoûte, la viande du duykers leur
semble trop noîre; en outre, ces deux animaux
sont toujours d’une maigreur extrême,
raison suffisante pour qu’ils les rejettent;
mais la preuve la plus frappante que
nulle idée chimérique 11e le s prive de cette
ressource, c’est qu’au besoin et dans les mo-
mens de disette, je les ai vus se tenir heureux
d’y pouvoir recourir. De ce qu’un
Hollandais se révolterait à la vue du plat dç