çoit difficilement pourquoi cette riviere ne
s’étend pas jusqu’aux déserts d’A frique,et
borne son cours à une mince portion d’une
très-mince partie de la terre; et comment
peut-on jamais périr de soif et de faim, quand
les marchés de la capitale sont garnis de
toutes parts , et regorgent de mille provisions
différentes? Combien, dis-je, je me
félicitois de posséder dans mes animaux domestiques,
les plus inutiles en apparence ,
d’aussi bons surveillans, et des amis si nécessaires
à ma conservation! Dans ces mo-
mens de crise, mon fidèle Keès ne quittoit
point mes pas; nous nous écartions un moment
de nos voitures ; l’adresse de son instinct
l ’avoit bientôt conduit à quelqu’une
de ces plantes : la touffe, qui n’existoit plus,
rendoit ses cabrioles inutiles; alors ses mains
labouroient la terre. L ’attente eut mal répondu
à son impatiente avidité; mais, avec
mon poignard ou mon couteau je venois a
son secours, et nous partagions loyalement
le fruit précieux qu’il m’avoit découvert
Deux autres racines de la grosseur du
doigt, mais fort longues, me procuroient un
égal soulagement. Elles étoient douces et
tendres ; un léger parfum de fenouil et d’ams
me les faisoit même préférer, lorsque j’avois
le bonheur d’en découvrir. on en trouve
dans les colonies; elles y sont connues, l’une
sous le nom d’anys-wortel, l’autre sous celui
de vinkel-wortel.
I l croît dans les cantons pierreux une espèce
de pomme-de-terre, que les sauvages
nomment kaa-ncip / sa figure est irrégulière;
elle contient un suc laiteux d’une
grande douceur ; on suce uniquement cette
espèce de pulpe pour en extraire et en savourer
le lait : j’ai essayé de la faire cuire,
elle val oit beaucoup moins, ainsi que toutes
les autres, attendu la trop prompte décomposition
de la substance délicate qui s’évapore,
se dénature, et ne laisse qu’un résidu
fort insipide.
Quelques autres, racines cuites dans l’eau
ou sous la cendre à la manière des châtaignes,
en approehoient beaucoup pour le
goût.
Les fruits sauvages se réduisent à un très-
petit nombre; je n’ai jamais rencontré que
des arbrisseaux dont les baies,plus ou moins
mauvaises,ne peuvent guère tenter que des
enfans * c’est ainsi que les nôtres, dans le
fond des campagnes, se font un doux régal