
étoit rempli. Nous allions bientôt arriver
dans le gros de la colonie j résolu de ne m’y
point arrêter un seul moment, j ’aurois regardé
comme un grand malheur le moindre
accident qui fût venu retarder ma marche.
Persuadé que nous n’avions plus rien à
craindre des vagabonds, et voyant tous mes
gens assez tranquilles et débarrassés de leur
frayeur, je me proposai de marcher tant de
jour que de nuit, ce que j’exécutai le 3 4 à cinq
heures du soir dans le même ordre que par le
passé.Nous passâmes le Kleine-Moster-Hoech
(petit Coin de Moster), nom d’un habitant,
ainsi que le Ritt-Fontyn ( Fontaine des R o seaux),
et fîmes halte à minuit àla Fontaine
des Nattes, M.atjes-Fontyn : le temps se couv
r it et nous menaçoit d’un orage, mais il s’éloigna
de nous ; le lendemain je passailé W it -
"Waater {FEau Blanche'), pour dételer à
Constaapel ( Canonnier ) 5 c’étoit une habitation
assez agréable, mais la disette d’eau
a contraint le colon à qui elle appartenoit
de l’abandonner. Quoique la saison fût avancée
les chaleurs n’avoient pas diminué : forcés
de rester inactifs pendant les plus grandes
ardeurs du soleil, il nous brûloit d’autant
m ieu x , que nous étions entièrement
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privés d’ombrage et de tout abri pour nous
en garantir ; l’accablement où nous étions
plongés ne nous permettoitpas même les distractions
de la chasse; on sait trop que les
chaleurs étouffantes ne servent pas à provoquer
l ’appétit ; qu’alors les viandes ou fraîches
ou salées ne font que rebuter, et qu’elles
augmentent le dégoût, ainsi nous ne faisions
plus de cuisine : mes Hottentots dormoient
durant la journée - moi, je ne vivois que des
biscuits de mademoiselle Dina, et toute la
recherche de ma sensualité consistoit à les
tremper dans du lait de chèvre, que je pre-
nois toujours avec plaisir. Je ne puis trop
recommander au x voyageurs qui entre-
prendroient des courses pareilles aux miennes,
de se procurer un grand nombre de ces
animaux si utiles et si doux 3 ils recherchent
l ’homme , s’attachent à lu i , le suivent partout,
ne lui causent aucun embarras, et n’exigent
aucun soin : ils lui fournissent tous les
jours de quoi se nourrir à-la-fois et se dé- '
s altérer. Tout en se jouant, ces pauvres bêtes,
qui ne sont point difficiles comme les
autres animaux, s’accommodent de tout,
peuvent supporter la soif pendant très-longtemps
sans que leurs sources tarissent.