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m’aüîoient amusé chez eu x , qu’un détache*
ment ne partît pour s’emparer de mon camp,
et massacrer ceux à qui j’en aurois confié
la garde. Tant d’horreurs commises par les
blancs me faisoient une loi de prendre mes
sûretés avec ces sauvages, dont je n’aurois
eu rien à craindre dans toute autre circonstance.
C’est ainsi, par exemple, que j’observ
a i à leur égard, avec encore plus de rigueur
, la loi de ne laisser aucun étranger
s’introduire la nuit dans mon camp : mon
vieu x Swanepoël veilloife à ce que cette discipline
s’observât religieusement; nous dormions
toujours isolés ,et murés dans nos
parcs ; il étoit encore moins permis de sortir
dans la nuit, ce temps étant toujours celui
que choisissent les sauvages pour former
* leurs attaques contre les blancs, que leur
couleur et leurs vêtemens décèlent bientôt,
et qu’on apperçoit de fort loin; mon absence
bien connue de ces Caffres , tout m’auroit
alarmé sur le sort de ceux qui ne m’auroient
pas suivi: en ne leur faisant point connoître
le moment précis de mon départ, ils s’en
alloient avec la certitude que , lorsque
je me remettrois en marche , je ne lais-
serois rien après moi, car je leur avois dit
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que je renverrois mes chariots dans la
colonie.
Enfin, le 21 novembre ils vinrent tous
me prévenir qu’ils s’étoient arrangés pour
partir le jour même; ils renouvelèrent leurs
protestations de reconnoissance et de bonne
amitié, et me promirent que par-tout où. ils
passeroient, leur premier soin seroit de
I publier ce qu’ils avoient v u , combien ils
I avoient à se louer de mo i, et la façon affec-
I tueuse et familière avec laquelle je les avois
I traités pendant un assez long séjour; que les
I richesses dont je les avois comblés feroient
E plus d’un jaloux, et que toutes les hordes
m’atten droient avec la plus viv e impatience,
et me verroient arriver avec joie. La description
qu’ils se promettoient. de faire de
I mon camp, de ma personne, et sur-tout de
K ma barbe, devoit, ajoutaient-ils, servir de.
I signalement à ceux qui ne me connoissoiejit
I pas , et me faire accueillir tout autrement
I qu’un colon. Us se tournèrent ensuite ,
I comme de concert , du côté de ma tente, sur
I laquelle flottoit un pavillon, et me deman-
I dèrent si je ne le porter ois pas avec moi, afin
qu’on m’apperçût de plus loin; sur ma réponse
affirmative, ils jetèrent des cris de