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laquelle deux croisés, compagnons d’armes de Boniface III, marquis
de Monferrat, auraient donné en 1204, à la ville d’Incisa,
un morceau de la vraie croix plus une bourse contenant une
sorte de grains de couleur d’or et en partie blancs, inconnus
dans le pays, qu’ils rapportaient d ’Anatolie, où iis s’appelaient
Meliga, etc. L ’historien des croisades, Michaux, et ensuite Daru
et de Sismondi, ont beaucoup parlé de cette charte; mais le botaniste
Delile, ainsi que Targioni-Tozzetti et Bonafous lui-méme
ont pensé qu’il s’agissait de quelque Sorgho et non du Maïs. Ges
vieilles discussions sont devenues risibles, car M. le comte Riant »
a découvert que la charte d’Incisa est une pure fabrication d’un
imposteur du siècle actuel! Je cite cet exemple pour montrer
combien les érudits, qui ne sont pas naturalistes, peuvent se
tromper dans l’interprétation des noms de plantes, et aussi combien
il est dangereux dans les questions historiques de s’appuyer
sur une preuve isolée.
Les noms de Blé de Turquie, Blé turc donnés au Maïs dans
presque toutes les langues modernes d’Europe ne démontrent
pas mieux que la charte dlncisa une origine orientale. Ge sont
des noms aussi faux que celui du Goq d’Inde, en anglais Turkey,
donné à un oiseau venu d’Amérique. Le Maïs a été appelé en
Lorraine en dans les Vosges Blé de Rome, en Toscane Blé de S i cile,
en Sicile Blé d'Inde, dans les Pyrénées Blé d'Espagne, en
Provence Blé de Barbarie ou de Guinée. Les Turcs le nomment
Blé d'Egypte, et les Egyptiens Dourah de Syrie. Dans ce dernier
cas, cela prouve au moins qu’il n'est ni d’Egypte ni de Syrie. Le
nom si répandu de Blé de Turquie date du xvi® siècle. Il est
venu d’une erreur sur l ’origine de la plante, entretenue peut-
être par les houppes qui terminent les épis de Maïs, qu’on aurait
comparées à la barbe des Turcs, ou par la vigueur de la plante,
qui motivait une expression analogue à celle de « fort comme
un Turc ». Le premier botaniste chez lequel on trouve le nom
de Blé turc est Ruellius ^ en 1536. Bock ou Tragus fe en 15 5 2 ,
après avoir donné une figure de l ’espèce, qu’il nomme Frumentum
turcicum, Welschkorn des Allemands, ayant appris par des
marchands qu’elle venait de l’Inde, eut l ’idée malheureuse de
supposer que c’était un certain Typha de Bactriane, dont les
anciens avaient parlé vaguement. Dodoens en 1583, Gamerarius
en 1588 et Matthiole » rectifièrent ces erreurs et affirmèrent
positivement l ’origine américaine. Ils adoptèrent le nom de
May s, cju’ils savaient américain.
1 . Riant, La charte d’Incisa, brocli. in-8®, 1877, tirée à part de la Revue
des questions historiques.
2 . Ruelliu?, De natuva stirpium, p. 428 : « Hanc qiioniam nostrornm
ætate e Græcia vel Asia venerit Turcicum frumentum nominant. » Fu ch sius,
p . 824, répète cette phrase, en 1543.
3 . Tragus, Stirpium, etc., ed. 1552, p. 650.
4 . Dodoens, Pemptades, p. 509 ; Camerarius, Hort,, p. 9 4 ; Matthiole, ed.
1570, p. 305.
Nous avons vu (p. 291) que le Zea des Grecs était 1 Epeautre.
Bien certainement les anciens n’ont pas connu le Mais Les voyageurs
» qui décrivirent les premiers les productions du nouveau
monde furent très surpris à sa vue, preuve évidente qu ils ne
Favaient pas connu en Europe. Demandez , parti d Europe en
1 5 7 1 , suivant les uns, en 15 9 3 , suivant d’ autres fe ne savait
pas qu’à Seville, dès l’année 1500, on avait reçu beaucoup de
b ’aines de Maïs pour le mettre en culture. Le f ait, attrete par
Fée, qui avait vu les registres de la municipalité , montre bien
Forigine américaine, en raison de laquelle Demandez trouvait
le nom de blé de Turquie très mauvais.
On dira, peut-être, que le Maïs, nouveau pour 1 Europe au
XVI® siècle, existait quelque part en Asie qu en Afrique avant la
découverte de FAmérique? Voyons ce qu’il faut en p e n s / .
Le célèbre orientaliste d’Herbelot ® avait accumule plusieurs
erreurs, relevées par Bonafous et moi-même, au sujet d un pare
sage de l ’historien persan Mirkoud, du xv® siècle sur une mreale
que Rous, fils de Japhet, aurait semée sur les bords de la mei
Gaspiennë et qui serait le Blé de Turquie / e s modernes. D ne
vaut pas la peine de s’arrêter à ces assertions d un savate qui
n’avait pas eu l’idée de consulter les ouvrages des botanistes de
son époque ou antérieurs. Ge qui est plus important, c e /
silence absolu, au sujet dn Maïs, des myageurs qui f f i f f i f f i
FAsie et l ’Afrique avant la découverte de 1 Amérique c est aussi
Fabsence de nom hébreu ou sanscrit pour cette plante ; et etein
que les monuments de l ’ancienne Egypte n en présentent aucun
échantillon ou dessin fe Rifaud, il est vrai, a trouve une fois
CA-iSUC UCllia ± E g y p t e ,____ -
ments et aurait été lié à des idées religieuses, comme les autres
plantes remarquables. Une espèce aussi facile a cultiver se sei ait
répandue dans les pays voisins. L a culture n aurait pas ete abandonnée,
et nous voyons, au contraire, que P ro sp /M p in , viteant
l ’Egypte en 1592, n’en a pas parlé, et que Forskal , a la fin du
XVIII“ siècle, mentionnait le Maïs comme encore peu culDve m
Egypte, où il n’avait pas reçu un nom distinct des Sorghos. Ebn
Baithar, médecin arabe du xiii“ siècle, qui avait parcouru les
pays situés entre l’Espagne et la Perse, n indique aucune plante
qu’on puisse supposer le Maïs.
1 . p. Martyr, Ércilla, Je an de L e r y , e tc ., de 1516 à 1578.
2 . Hernandez, Thes. mexic., p. 242.
3 . Lasègue, Musée Delessert, p. 467.
4 . F ée, Souvenirs de la guerre d Espagne, p. 128.
to “ ë * ’ f f e t o l T « r R a s p a i l . ibid. ; Unger,
Pflanzen dès alten Ægyptens; A. Braun, Pflanzenreste ægypt. Mus. in Berlin,
Wilkinson, Manners and customs o f ancient Egyptians.
1 . Forskal, p. L I IL
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