
On ne sauroit s’étonner qu’un peuple na^
turellement superstitieux , attache à ces rui-
^ nés , à ces tombeaux, à tant de monumens.
qui rappellent le néant de la vie , des idées
de fatalité : aussi trouvons-nous que les ha-
bitans de Iona surpassent de beaucoup en.
crédulité ceux des autres Hébrides. A la foi
dans mille histoires fabuleuses de revenansefc
de farfadets, à toutes les croyances que l’aspect
d’une nature sauvage et sombre produit généralement
chez les Montagnards écossais, se
joignent dans l’île de loua , bien des supers-*
titions particulières, qui tiennent à l’ancien
état de celte petite île. L ’idée des pierres de
la fin du monde est ancienne et paroît
avoir régné déjà lorsque les Moines habi-
toient l’Abbaye. Car, suivant M.E Sache-
verel, gouverneur de Man, qui visita Iona.
en 1688 , il y avoit dans l’Abbaye même,
trois beaux globes de marbre blanc, placés,
dans trois bassins de pierre , qui étoient
l’objet de la même croyance que les clacha
bra'th actuels, et qui furent détruits par
ordre du synode protestant d’Argyle. Une
ancienne prophétie gaélique, que l’on répète
encore de nos jours, montre l’idée que se
i sa» )
faisoient les Hébridiens , de la supériorité
de la petite île de Iona, sur toutes, les contrées
qui l’avoisinent , et du rôle qu’elle
devoit jouer à ce moment terrible , où un
nouveau déluge engloutiroit O D la terre habitable.
C a r , d’après cette prédiction, lorsque
toutes les îles environnantes , lorsque l’Irlande
même aura disparu sous les eaux,
I-Colm-Kill la Sainte élèvera encore fièrement
sa tête, pendant sept années, au-dessus
de la plaine liquide.
Notre maître d’école nous conduisit sur
le sommet d’un petit coteau auprès de
la Cathédrale , pour nous montrer un
vaste bassin qui étoil jadis rempli d’eau,
mais qui est à sec depuis plus d’un siècle.
Cet étang, nous dit-il, étoit le vivier où les
Chanoines de celte riche Abbaye avoient
rassemblé les poissons les plus délicats pour
leur table. C a r , s’il faut en croire Martin et
d’autres anciens voyageurs , malgré la solitude
et l ’isolement de leur couvent , les bons
Religieux ne laissoient pas que de faire une
chère très-recherchée. Ils avoient probablement
aussi de beaux jardins , dont on ne
voit aujourd’hui aucuùe trace.