Nous n’ajoutons donc pas la moindre confiance à
la théorie contraire qui prétend établir que « c’est le
<( tissu utriculaire qui, de proche en proche, et sou-
« vent avec une r a p id i t é s u r p r e n a n t e , se transforme
« en vaisseaux, par 1 allongement de ses utricules, par
« la r é s o r p t i o n d e s c l o i s o n s qui les séparaient, et par
« les modifications que les'dépôts secondaires viennent
« apporter dans la nature de leurs parois » (p. 285),
car tout cela ne se trouve que dans l’imagination (1)
quelque peu égarée des auteurs qui ont beaucoup plus
observé dans les mauvais livres que sur la nature.
xMais nous reviendrons sur ce sujet, dès que nous
pourrons aborder les faits si simples et si beaux de
l’organogénie des tissus divers qui entrent dans la
composition des végétaux et de toutes leurs parties,
quand le temps sera venu de faire connaître la nature
des fluides distincts qui les produisent et les forces
qui président à leurs développements et aux modifications
qu’ils subissent dans le cours de leur existence.
Nous profiterons de cette occasion pour mettre la
théorie de nos derniers contradicteurs en regard de
cette autre invention créée pour les Monocotylés ;
(1) Si dans leurs théories nos contradicteurs avaient explicitement
indiqué une direction quelconque au développement des tissus
ligneux des tiges, cette direction, quelle qu’elle fû t, serait
naturellement démentie par le double phénomène de descension
d’une part et d’ascension de l’autre. Mais ils se sont prudemment
abstenus, du moins jusqu’aujourd’hui. Nous reviendrons sur ce suje
t d ’une très-haute importance en traitant de la vitalité des êtres
végétaux complexes, des phytons distincts, simples ou composés, et
des parties ou articles qui les composent.
« L’oeil, à l’aide d’un puissant microscope, ne tarde
« pas à découvrir çà et là dans la partie la plus excen-
« trique de ce tissu (le tissu générateur), de très-
(( petits espaces vagues et nébuleux. Quelquefois
(( aussi, dans certaines places, il semble qu’il y ait
(( eu déformation ou même dissolution de mem-
« branes utriculaires. Là se produisent et s’accu-
« mulent confusément des granules d’une extrême pe-
« titesse. A cette espèce de chaos succèdent bientôt
K l’ordre et la symétrie. Les granules se meuvent, se
(( rencontrent, s’ajustent ensemble comme s’ils étaient
« ANIMÉS, et si j ’ose le dire, bâtissent des utricules qui
« ne diffèrent de celles qu’on voit communément que
« parce que leurs parois sont mamelonnées, et il n’est
« pas rare que, dans cet état, ces utricules se groupent
« et se disposent de manière à former des filets.
(( Peu après, les mamelons des granules s’effacent
« et l’on ne voit plus rien qui distingue ces utricules
« des autres (1). »
Nous analyserons avec soin ces deux théories, et nous
les apprécierons avec la franchise qui nous caractérise.
(1) Voy. Comptes rendus de l'Académie des sciences, séance du
7 octobre 1844, p. 698, lig. 2.
Le phénomène, comme on le voit, ne brille pas par sa simplicité.
Des utricules primitivement formées, on ne dit pas comment, se
fondent. Le fluide qui en résulte donne naissance à des granules
d’une extrême petitesse. A cette espèce de chaos succèdent bientôt
l’ordre et la symétrie, ce qui n ’est certes pas malheureux. Les granules
se meuvent, se rencontrent, s’ajustent ensemble comme s’ils
étaient animés, et bâtissent des utricules q u i, en fin de cause , ne
diffèrent plus en rien de celles qui les ont précédées. C’est réelle