Revenons à notre sujet. Je ne parlerai point
de la théorie de la terre, du docteur Hutton
d ’Edimbourg , parce que , ne devant traiter ici
que de l'état présent de la Géologie , je réserve
la discussion de ce système pour d’autres temps ;
mais je ne dois pas laisser ignorer qu’un de ses
disciples, qui semble devoir marcher à grands pas
dans cette science, sir James Hall, est auteur d’une
théorie de la terre qui diffère de celle de son
maître , en ce que pour expliquer l’état actuel
de nos continents et l’excavation des vallées , il
admet le déplacement subit et violent des eaux de
la mer, se précipitant du haut des montagnes dans
les plaines,, avec la force et les phénomènes qui
ont du résulter de la pesanteur et de la vitesse d’un
fluide qui tombe de plusieurs milles de hauteur.
C ’est à cette épouvantable chute d’eau qu'il
attribue le sillonnement de la terre , ainsi que le
déplacement et le transport de tant de corps
étrangers , qui attestent ce grand accident de la
nature, entièrement étrangers aux différents de-
Bacon. (( L ’étude de la nature est comme la fabrique des
o> arts, et; ^e^sciences. Si elles ont. été des siècles entiers
» en proie à la barbarie , il faut s’en prendre au despo-
3) tisme des théologiens , qui avaient renversé tous les
3) principes du raisonnement; Ife moyen d’avancer avec
3) un voile sur les y e u x , et des chaînes aux pieds ! »
Analyse de la philosophie du chancelier Bacon, tom. i.
pag. 46, • : " • U$Üé
luges, réels ou supposés , partiels ou généraux ,
dont les auteurs anciens ont fait mention. Je développerai,
lorsqu’il en sera temps, cette théorie
dont les bases reposent sur beaucoup de faits ,
et dont Saussure , Dolomieu et moi, avons recueilli
et donné plus d’une preuve , il y a déjà
plus de vingt ans , sans néanmoins nous être
expliqués sur la cause qui a pu déterminer de si
grands déplacements des eaux de la mer , parce
que nous étions unanimement d’avis, qu’avant de
pouvoir embrasser avec fruit une théorie , il était
absolument indispensable de laisser grossir la
masse des faits , de les discuter , de les analyser
pour ainsi dire un à un avant de les admettre,
et que ces faits devaient être mis ensuite en réserve
comme autant de matériaux de choix destinés
au grand édifice d’une théorie , faits qui
viendraient se ranger naturellement eux-mêmes
à la place qui leur était destinée, et se serviraient
respectivement d’appui.
Cette marche qui paraît ê tre strictement la meilleure
, est moins agréable sans doute pour ceux
qui sont impatients de jouir; elle mène h moins de
gloire, et a une réputation moins brillante et moins
flatteuse que celle qu’on peut obtenir momentanément
par les prestiges d’une imagination vive ,
et par l’éclat des tableaux qu’elle peut eufanter;
mais elle est fondée sur une longue et difficile
étude de la nature sur les lieu x , sur l’examen