(Ians les premiers tem[)s s’étalilir avec cinekjiies richesses
dans une colonie nouvelle, auraient tort de s’attendre
à des jouissances immédiates on à un rapide accroissement
de fortune. S’ils sèment pour l’avenir de leurs
petits-neveux, c’est à la condition de s’imposer a eux-
mémes de sensibles et constantes privations, et ce n est
pas fail pour les encourager.
On avait lûen compris autrefois la difficulté dont je
parle, c’est ce qui explique les nombreux privilèges accordés
par nos rois aux premiers habitants des colonies
françaises. Il fallait un autre mobile que l’intérêt ou le
bien-être matériel pour attirer dans ces établissements
des familles douées de quelque fortune ou de quelque
industrie; on s’adressa à l’amonr-propre ; on ne craignit
pas de [u'odiguer les distinctions, les lettres de noblesse,
les privilèges honorifiques de tout genre, et on eut raison;
on n’aurait pas réussi sans cela.
Dans notre siècle d’argent et d’égalité ces moyens ne
sont plus de mise; est-ce un bien, est-ce un mal? Je n’ai
point à jirononcer, mais il est bien certain qu’en se privant
des ressources qu’offraient les récompenses qui
flattent l’amour-propre, la société moderne a perdu un
puissant moyen d’action que ne remplaceront jamais les
récompenses pécuniaires quelque libéralement que les
finances publiques permettent de les répartir.
Reste donc pour unique ressource la colonisation au
moyen des condamnés. Bien des hommes politiques se
sont déjà occupés de cette destination à leur donner,
comme moyen de débarrasser de leur présence le sol de
la mère patrie.
Envisagée sous ce point de vue, la question présentait
de graves difficultés, elle n’est point encore résolue.
Peut-être eût-il été plus facile d’arriver à sa solution si
on eût considéré la colonisation comme but, l’éloigne-
ment des condamnés comme conséquence.
Dès lors, en effet, on aurait été moins embarrassé de
trouver un lieu propre à les recevoir, et on se fût moins
préoccupé d’une considération qui semble avoir dominé
toutes les autres; je veux parler de la nécessité de les
mettre dans l’impossibilité d’en sortir. Sans doute, le
gouvernement est responsable envers la société de la
garde des criminels qui se sont mis en révolte contre
elle. 11 faut employer tous les moyens propres à la garantir
contre de nouvelles attaques de leur part ; mais il
faut aussi remarquer que tous ne sont pas également
dangereux et n’exigent pas la même surveillance; que le
plus grand nombre hésiterait sans doute a tenter une
évasion, toujours dilficile quand il iaut traverser les
mers, et à échanger une situation relativement heureuse
contre la chance de se perdre et de retomber aux mains
de la justice ; que probablement la plupart d’entre eux
et les moins profondément pervertis s’attacheraient à un
genre de vie conduisant à la réhabilitation et à un bien-
être certain dans l’avenir ; ((u’enfiii rien n’obligerait à
donner une destination coloniale à tons les condamnés
sans distinction; (pi’il serait possible d’établir législative