principales. Mais entre ces plats s’étalaient à profusion
ce que ¡’appellerai les entremets pour me conformer à
notre vocabulaire gastronomique. Ces entremets se composaient
de taro, de poisson sec, de poyé, et enfin du
louaou, ragoût favori fait avec les jeunes tiges et les feuilles
parfumées du taro et qui donnait son nom à la fête.
<( Jusque-là rien qui s’écartât le moins du monde des
habitudes locales; c’était, on le voit, un dîner tout
sandwicbien. Mais les hôtes de la table royale étaient
des Européens ; il fallait bien que quelque chose leur
raj^pelât les productions de leur pays ! elles furent représentées
par les boissons qu’on servit avec une libéralité
toute princière : les vins de Bordeaux , de Porto et de
Madère remplissaient incessamment les coupes des convives;
ils étaient servis par des Kanakas qui entouraient
la table en grand nombre, épiant le moindre signe et se
disputant la faveur d’être nos échansons.
« Les hauts personnages de la cour faisaient les honneurs
du festin; leur empressement à nous servir de
tous les mets qui figuraient devant nous témoignait de
leur désir de nous être agréables; mais, à la dimension
des morceaux dont ils chargeaient nos assiettes, nous
dûmes supposer qu’ils avaient de notre appétit une idée
fort exagérée. Un d’eux m’offrit, entre antres choses, un
quartier de cochon qui eût pu figurer chez nous comme
un très-beau rôti dans un dîner de quinze à vingt couverts*.
‘ M. Fisquet, journal particulier.
H Je pensai d’abord qu’il m’invitait à le découper et
je me mettais en devoir de le satisfaire, quand il me fit
signe, de l’air le plus gracieux, que tout était pour moi.
Refuser eût été une impolitesse ; je taillai donc quelques
bouchées dans la pièce de résistance qui gisait là comme
un défi ; mais, dès que je vis les yeux de mon trop libéral
grand seigneur occupés d’un antre côté, je m’empressai
bien vite d’envoyer le quartier de cochon satisfaire
des appétits plus vigoureux que le mien.
(C Cependant, la gaieté animée par d’abondantes
rasades circulait autour de la table et éclatait de toutes
parts en notes bruyantes. Les toasts particuliers se croisaient
sans interruption et menaçaient de compromettre
la dignité de la noble assistance. M. Vaillant se leva et
porta la santé de notre royal amphitryon, Taméaméa III,
souverain des îles Sandwich. Les échos du Paris retentirent
d’un triple hourra, mais le roi, se levant à son tour,
mit le comble à l’enthousiasme en proposant, d’une voix
forte, la santé du grand roi des Français, Sa Majesté
Louis-Philippe L* ! Les acclamations des convives, celles
de la multitude de Kanakas qui nous entourait y répondirent
avec une telle explosion, qu’il y aurait eu de quoi
faire écrouler les voûtes de toute autre salle à manger.
« C’était le bouquet. Après cela il n’y avait plus qu’à
partir.
!i I
Un temps de galop.
(( Les chevaux sont prêts. Les cavaliers sautent en selle,
Bonite. — Relation du voyage. Tome II. JQ