(lu vice [)i)ur narguer les mépris des autres hommes, car
c’csl encore pour lui se relever que de se placer par sou
audace au-dessus de leurs jugements.
Ceci me seinhle vrai surtout de ces caractères fortement
accusés que la passion emporte, qu’exalte le besoin
ou que l’amour-propre, blessé par la comparaison
de leur misère avec l’opulence d’autrui, a précipités
dans le crime.
Donnez à ces hommes une nouvelle pati'ie où personne
n’aura le droit de leur rien reprocher, où chacun,
chargé de ses propres remords, devrait craindre de jeter
à son voisin la première pierre ; montrez-leur un avenir
heureux et honoré comme conséquence certaine des
efforts qu’ils feront pour le construire de leurs propres
mains, rien qui les humilie ou les décourage, mais
au contraire tout ce qui peut les réhabiliter à leurs
propres yeux et fortifier leur espérance, vous les verrez
déployer une énergie , dont seuls peut-être ils sont capables,
pour supporter les rudes labeurs et surmonter les
difficultés qu’entraîne la fondation d’un établissement
nouveau.
Aux hommes qui jouissaient dans leur patrie d’une
certaine aisance, il faut l’appât d’une grande fortune à
faire pour qu’ils se déterminent à s’expatrier. A l’ouvrier
laborieux ou à l’honnête laboureur qui gagne sa vie par
son travail, il faut aussi l’espoir d’un plus grand bien-
être moins péniblement acheté. Mais ni l’un ni l’autre ne
peuvent se promettre de tels avantages dans une colonie
nouvelle. Les commencements sont pénibles et les bénéfices
ne peuvent être que l’oeuvre du temps.
Je ne crois point aux colonies dont le fondement repose
sur des idées de spéculation. Les capitalistes qui
engagent leurs fonds dans une opération de ce genre
doivent s’attendre à les perdre. Les travailleurs qu’ils
auront enrôlés, en les trompant par des promesses d’un
bien-être impossible, les abandonneront, dès qu’ils auront,
par expérience, reconnu la vérité. Ne l’avons-nous
pas vu de nos jours, et faut-il encore de nouvelles preuves ?
Aussi en remontant à l’origine de la plupart des colonies,
trouve-t-on presque partout, comme premiers ouvriers
de ces précieuses créations, des aventuriers, des
gens sans aveu et sans ressources, qui tous avaient eu
plus ou moins à démêler avec la justice de leur pays.
A des individus de cette condition, il faut en effet
autre chose que la perspective plus ou moins trompeuse
d’une fortune rapide. Ce qu’il leur faut avant tout, c’est
de trouver, n’importe à quel prix, un lieu où ils puissent
vivre tranquilles et sans crainte d’y être inquiétés ou recherchés
pour leur passé.
C’est quand ils ont ébauché l’oeuvre, que d’autres peuvent
venir pour Fétendre et la perfectionner ; ces nouveaux
venus contribuent d’autant plus à développer les
germes de prospérité d’une colonie récemment fondée,
qu’ils y apportent plus de ressources et d’aisance, car il
est vrai de dire que les capitaux sont un moyen puissant
de féconder le travail. Mais ceux-là même qui viennent