mier objet qui frappa mes regards fut l’église cathédrale,
dont la façade occupe le côté N. de la place'. C’est un
bel édifice et d’un aspect monumental : les deux tours
élégantes et le dôme qui le couronnent, les statues, les
sculptures qui le décorent à 1 extérieur, produisent un
ensemble remarquable et qui emprunte un caractère
tout particulier des couleurs variées dont on a jugé à
propos de peindre tous ses ornements de détail. Ce n’est
peut-être pas d’un goût bien pur, si nous en jugeons
d’après nos idées architecturales ; mais c est d un effet
agréable et plaisant à l’oeil.
« Il n’est pas bien sûr, au surplus, que ce mélange
des couleurs à la sculpture et a l’architecture mérité la
proscription dont on est convenu de le frapper chez
nous. Les anciens ne paraissent pas avoir été si exclusifs.
La fameuse statue de Minerve, dans le Parthénon
d’Athènes, n’était certes pas enduite de couleurs factices;
mais sur l’ivoire du visage et des chairs, tranchait l’or du
casque et de l’égide. Phidias employa même une pierre
d’une teinte particulière pour figurer l’iris des yeux. Le
Jupiter Olympien présentait les mêmes oppositions de
couleurs : l’or, l’ivoire, l’ébène, les pierres précieuses
étaient répartis suivant l’effet que devaient produire
leurs diverses nuances. La Minerve et le Jupiter Olympien
en sont-ils moins restés les deux chefs-d’oeuvre de Phidias ?
(( On ne supposera pas, je l’espère, que je veuille com-
* Voy. la planche n” 27 de VAlbum historique.
DE LA BONITE, 4S
parer la cathédrale de Lima aux monuments de l’ancienne
Grèce. Je n’ai, en faisant ces observations, d’autre but
que de répondre aux critiques un peu partiales de
quelques voyageurs prévenus. Ces critiques ne me paraissent
pas mieux fondées quand elles s appliquent a la
matière employée dans les constructions monumentales
de Lima. La partie inférieure est seule en pierre ; les
dômes et les clochers sont en bois enduit de plâtre.
C’était nécessaire dans un pays où les tremblements de
terre sont fréquents et produisent de terribles effets.
Est-ce à dire que l’aspect général y perde de son caractère
grandiose, quand d’ailleurs toutes les proportions
sont exactement observées ? Je ne le pense pas. Cela ne
serait vrai tout au plus, que si l’exclusion de matériaux
plus précieux accusait une certaine parcimonie que réprouve
le sentiment du grand et du beau. Mais il est aisé
de se convaincre du contraire en penetrant dans 1 intérieur,
où les plus riches ornements sont libéralement
prodigués.
« La cathédrale de Lima ne le cède sous ce rapport
à aucun monument de ce genre. Nous remarquâmes
particulièrement le maître-autel en argent massif, placé
sous un dôme en argent, que soutiennent de hautes colonnes
du même métal. Le choeur est orné de statues
des saints en bois admirablement sculpté ; de beaux tableaux
y représentent l’école espagnole. Sous 1 église
sont des souterrains, où se trouvent les tombeaux de
tous les évêques de Lima.