leuse ( i ). L'homme, sortant du sein de la
Nature, s’ouvre une double carrière, celle
de la barbarie et des attentats de toute es-
pèce , qu’il est nécessaire de franchir pour
arriver à celle de la perfection. Je montrerai
aisément, par des‘exemples historiq ues, que
1 anthropophagie est déjà un commencement
de civilisation (2), d’urbanité, et le premier
pas qui nous sépare de l’état de nature.
L ’ivresse de l’enthousiasme est la plus su-
'blime des passions. Voyez ce sauvage fait
prisonnier , que, déchirent et rôtissent ses
barbares vainqueurs. 5 écoutez-le entonnant
l’hymne de la victoire au sein des plus affreux
tourmens ; contemplez-le marchant à
la mort avec le calme de l’innocence , finis—
sant sa généreuse carrière sans lâcheté, sans
pusillanimité, et servant, encore tout en 1 2
(1) Pausanias, Voyag.en Grèce, trad. àe Gêdoyn',
t. 2 > p. 136.,Selon Henri Maurice Gottl. Greilmahn±
zur Bohem. etc. On exécuta plus de 100 bohémiens
anthropophages en 1782. La faim, a causé de pareilles
fureurs dans les disettes , les sièges de villes 'f
les vaisseaux. La famine aussi chez des sauvages.
Voyez Leclerc , Gaspés. c, i\, Elli& , Reîat. dé.
haie de Hudson, t. 2 , tr. fr. etc.
(2) G. R. Forstér, Addit. au 2e voyage de Cooé,t. 5,
p. 287, trad. fr. in-4.
4ÊtÊSSmW
v ie , de pâture à ses féroces ennemis. Le
genre d’existence du sauvage, le silence,
la sécurité d’une imagination souvent
plus alarmée de ce qu’elle invente et
qu’elle craint, que de ce qui est; l’éducation,
l’exemple journalier, une vie endurcie aux
fatigues, aux privations, sans cesse en butte
à la douleur : enfin le mépris des dangers et
de la mort, produit par l’ambition de la
gloire, par ce noble mobile des grandes âmes,
forment autant de héros de ces hommes de
la naturë. Quelle base inébranlable de constance
| de force, d’intrépidité pour établir
dans ces coeurs les premiers fondemens de
la société' ! Quelles vertus n’y déploieroient-
ils pas, en comparaison des peuples modernes
efféminés et avilis ! Ce n’est point
avancer un paradoxe que de trouver dans
les sauvages plus de sources de perfectibilité
que dans les hommes corrompus.
Est - il rien de plus violent, chez des
hommes barbares, que le sentiment implacable
de la vengeance ? S’enflammant d’autant
plus qu’il a davantage d’orgueil, et une
plus haute opinion de soi-même et de son
courage, l’américâin , le malais outrage,
n’est si impitoyable envers son ennemi prisonnier
que par ces féroces pensées. Voyez