récompenses pour en conserver la valeur, il
faut craindre d’être trop économe en encou-
ragemens publies. Quë ce soit le sentiment
qui les donne, et non l ’orgueil dédaigneux
qui les accorde ; quë le premier vivifie tout,
préside à tout, et nous Verrons bientôt
éclore des chef - d’oeuvres dans tous les
genres. Malheur à la perfectibilité,quand la
dissipation et les plaisirs passagers font la
suprême étude de l’homme ! Il est des plaisirs
plus précieux et plus doux dans le recueillement
de l’ame qui médite ; mais il faut
avoir cette ame chaleureuse pour lés sentir,
pour s’enivrer de leurs divins attraits avec
délices. C’est dans la solitude que s’allument
les grandes passions ; la société riè fait que
nous en distraire. Ne soyons jamais, sobres
en sensations. L ’homme n’est souvent que
ce qu’on lé fait ; l’enfant n’est qu’une pâte
qu’on pétrit à volonté : heureux qui sait bien
la mouler ! Endurjcissez les corps , faites
qu’ils bravent les besoins et la douleur : a lâ
bonne heure ; mais que les coeurs demeuren t
sensibles à la gloire - qu’ils préfièrent la mort
au crime et à l’infarnie ; qu’ils Réchauffent
aü récit des belles àctions ; qu’ils s’enflamment
à l’aspect dès belles productions des
sciences et des arts.
La froide raison n’est pas encore développée,
que l’ame de la jeunesse se sent déjà
tourmentée par la généreuse passion de la
gloire. C’est ce sentiment qui fait jaillir
toutes les sources de la perfection ; c’est le
trident de Neptune qui fait bopdir du sein
de la terre un indomptable et superbe coursier.
En frappant les en fans , on les-abrutit
par la crainte, on en fait, d imbecilles esclaves
5 ils deviennent lâches, hypocrites 9
médians. Voyez les sauyages américains j
ils craignent de gr onder même leurs en fans
pour ne pas briser leur courage , ou rompre
leur force d’am e ( f ) £ ils jjkL yfuient pas
même employer les armes de la persuasion;
ne seroit-cé pas tyranniser leur raison ? Ils
aiment bien mieux les conduire par l’amour
paternel ; ils se plaignent : l’efifant s ’attendrit
eh pleuré, : quelle leçon çe seroit pour
notre jeunesse, évaporée ! et faut-il que ce
soient des sauyages qui nous l’enseignent ! ,
Ôn n’a jamais vu faire quelque ;chose de
(1) Voyez Jean de L e r y , Voyag. Fr. êquinox. 1. 5 ,
p. 399. Charlevoix, Journal historiq. de l’Amér, sept,
lettr. 2.3 , août 1721. .Claude ,d*Abbeville, Hist. de la
mission des capucins dans l ’île de Maragnan, c. 47*
jLeclerg, Gaspésie, sc. 41 j etc»