semble qu’il faille être un peu bête pour être
bon. Tous ces hommes à beaux discours , et
qui ne peuvent parler sans chercher l’esprit
, sont ordinairement insensibles. L’esprit
excite le rire , et peut-on être touché
alors?Hommes simples, consolez-vous, car
vous avez une ame plus sensible que ceux
qui brillent par de futiles jeux de mots,
Vous pouvez connoitre la vertu , et vos
insensés détracteurs sont trop frivoles pour
ce mâle et fier sentiment. A mesure que les
nations se policent, elles deviennent plus
spirituelles et plus gaies | mais l’antique
bonne fo i/ la pureté des moeurs , la noblesse
de famé diSparoissent et s’effacent.
La franche rusticité de,nos ançetrçsn’éftoit
pas capable des faux brillans de notre esprit
• en revanche ils avoient un coeur magnanime
digne des plus sublimes vertus.
Lorsque la corruption des peuples amène
la dégradation des âmes , avec le çortège du
luxe et des vices, les arts et lés sciences tombent
en décadence , parce que des hommes
qui les cultivent n’y apportent plus le coeur,
mais la futilité de leur esprit. On voit alors
abonder de toutes parts les prétendus philosophes
, les demi - savans / les versificateurs
pçintilleux f les sophistes r et cette
toürbe impure de faux littérateurs , oisifs
et vicieux, qui veulent tout juger, tout
critiquer , tout régler sans être capables de
produire le moindre ouvrage eux-mêmes.
Heureux les peuples si l’esprit étoit moins
commun et plus épuré ! si la sensibilité du
coeur étoit moins rare !
Comme les beaux arts et les sciences
exactes nécessitent une application soutenue
, la reflexion du genie et une grande
chaleur d’ame pour y réussir ; on conçoit
bien que les personnes qui ont trop d’esjjrifr
n’en sont pas capables, et qu’il leur suffit
d’en efïïeuret la surface; Les études approfondies
épouvantent les têtes légères et su-
perficieîlês : Voilà pourquoi rien n’est plus
rare que* la véritable instruction dans ce
siècle de lumières. Sachons donner à fen -
fianee lesHeénnoissances qui conviennent à
chaque caractère. Un jeûne homme v if, ardent,
a-t-il beaucoup d’esprit ? il n’est pas
fait poui etre un grand génie j alors proportionnez
ses études a la force de son entendement.
Si vous voulez la surpasser, Vous
risquez de l’abrutir. Votre enfant est-il rêveur,
attentif, pénétrant ? instruiseZ-le, ou
plutôt laissez^-le s’instruire j vous le croirez
peut-être un génie médiocre. Mais attendez;
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