Üo6 HISTOIRE NATURELLE
la chaleur du sentiment et la fougue de^
passions ; c’est le fondement de l’éloquence;;
c est la pierre de touche qui distingue le vé—
ritahle enfant d’Apollon de l’insipide versificateur.
Ç’est ordinairement à l’âge de puberté que
se développe cette inconcevable activité dq
lame 5 c est lorsque nous naissons d’une
seconde vie > lorsque l’équilibre entre les
fonctions du système nerveux et celles des
autres systèmes organiques est rompu. L ’aC^
tion des nerfs dirigé la vie de tous les organes
j et si elle est trop prépondérante à leur
force, on devient sujet à la folie; à la démence,
à la manie, par la trop vive stimulation
des passions. D’autres personnes, au
contraire, nées avec une parfaite apathie
nerveuse, traînent perpétuellement dès leur
berceau jusqu’à la fin de leur carrière, leur
lourde atonie, leur stupide imbécilité. Réduites
à une sorte de végétation animale ,
elles languissent dans une complette, une
assommante insouciance. L ’aiguillon perçant
des' plus ardentes passions s’émousse
sur leur coeur de marbre. A leur incapacité
de connoître, s’est jointe l’impuissance d’agir.
Homme puissant et superbe qui te glorifie
d’être le premier dès corps vivans par
ton intelligence, vois ta raison succomber
sous le moindre effort ; ainsi tu descends, ou
plutôt tu es précipité au rang de la brute par
de foibles dérangemens dans, ton organisation!
Quelle est donc ta destinée sur cette
terre que tu foules sous tés pas et qui doit
t’engloutir? Il n’y a d’immortel que la vérité;
et cette intelligence qui peut à peine k
conquérir, que devient-elle dans le cours
de notre vie? Il suffit du dérangement d’une
fibre pour l’ensevelir dans la nuit du néant
Recherchons donc la nerveuse, la brûlante
sensibilité, puisque c’est elle seule qui
enfante le génie , qui invente et qui perfectionne.
Ç’est elle qui, allumant le flambeau
de l’imagination sans lequel on ne peut rien
faire,, nous transporte et nous enchante.
Tantôt elle nous place dans le séjour lumineux
des immortels , où la jeune Hébé fait
couler le nectar dans des coupes d’or; elle
représente à nos pieds la région enflammée
des tempêtes; elle étend sur nos têtes lés
voiles de pourpre et le pompeux spectacle
de l’aurore. Tantôt,descendant avec nous à
la lueur d’une lampe funéraire dans lelsom-
brès abîmes des tombeaux , elle nous fait
frémir, glacer d’epouvante au milieu du.
silence affreux de la mort , entrecoupé de