â6G. HISTOIRE NATURELLE
peuples dont l’état se maintient dans la bar-*
barie avec une sorte de fixité, par l’action
uniforme et constante de leur climat. Tels
sont les deux extrêmes de la chaleur et du
froid , le lapon et le nègre. Observons encore
que le premier anneau de cette chaîne
de la civilisation semble être placé vers les
pôles, et le dernier au sein de la torride.
La quantité des individus qui composent les
nations détermine aussi la nature du gouvernement
, qui se resserre d’autant plus
que les hommes sont plus nombreux. Il
semble que la masse de ces peuples soit en
raison directe de la chaleur des climats %
parce qu’il y a plus d’abondance dans les
productions alimentaires à mesure qu’il y a
moins de froidure. Il faut toutefois séparer
les termes extrêmes, comme nous l’avons
vu plus d’une fois.
Si nul grand peuple ne peut vivre
sous une forme de gouvernement populaire
comme une petite cité, il doit tendre sans
cesse à une domination plus resserrée * sans
cela le lien de son association trop foible le
laisseroit dans l’anarchie. Il semble que les
grandes nations soient plus faites pour 1©
midi, car elles ont avec lui une foule de
rapports d’analogie. Par un principe contraire,
les petits peuples se rapportent par
leur pauvreté, leur rudesse de moeurs, leur
courage et leurs âpres vertus, aux contrées
septentrionales. On ne peut être opulent sans
le luxe qui tient le despotisme par la main;
tandis que l’indigence s’arme du glaive de
^indépendance : aussi voijbon celles-ci toujours
supérieures aux premiers par la force.
Dans tous les siècles, la pauvreté courageuse
triompha de la richesse amollie. Tel
est le principe des bouleversera ens qui ont
renversé les; états et ensanglanté la terre.
Gomment en arrêter le débordement tant
qu’on ne remontera jamais aux causes ?
L ’homme qui a un® petite terre a cultiver
s’armera de courage pour la défendre ; celui
qui n’en a point vivra souvent de ses
crimes;, ou périra dans la misère. Ainsi l’on
a pensé avec raison, que de trop grandes
propriétés affoiblissoient et dépeuplaient lés
états. Par une cause analogue, plus les em*
pires ont d’étendue, moins ils ont de po-?
pulation ( 1 ) , puisque la propriété y est
moins assurée , en raison de la nature du
gouvernement qui les régit.
(1) Chardin l ’a obsêrVé dans l ’orient ; Voyagp cri
Perse,