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Juillet. en or d’un travail précieux, et la lame enduite d’un
poison subtil. Après le kriss, vint une pipe à opium
dont le tuyau était également recouvert d’or. Ce qui
nous surprit le plus, ce fut une charmante petite
mandoline tout incrustée de nacre et d’écaille, et qui
avait sans doute été faite pour les doigts délicats de
quelque belle créole de Manille. Le fond de la caisse
contenait pour trois ou quatre cents francs de doublons
d’Espagne, enveloppés séparément dans une
multitude de chiffons...
» Il nous fit aussi admirer quelques-uns d eces
grands kriss de Solo, à poignée d’ivoire sculptée et à
lame damasquinée d’argent. Pour l’un d’eux, M. Ger-
vaize offrit un beau fusil à deux coups ,1e datou parut
y consentir, le marché devait se faire le lendemain,
je ne sais s’il eut lieu.
» Molou nous avait donné ce qu’il avait de meilleur,
il nous avait montré ses trésors que nous avions
beaucoup loués et admirés ; aussi, plein de satisfaction
, il s’étendit sur ses coussins et fit un signe.
Bientôt deux femmes arrivèrent. L’une d’elles prit
dans un coin un énorme morceau d’opium et eh détacha
quelques parcelles qu’elle roula dans ses doigts;
l’autre approcha la pipe de la bouche du datou, et
alluma les petites boules que la première introduisait
successivement avec une longue épingle. Plusieurs
parcelles furent ainsi brûlées. Au bout de quelque
temps, les yeux du datou devinrent ternes, sé fermèrent
à demi; ses traits dans une espèce d’immobilité
cataleptique, offraient un ensemble étrange. Il
était plongé dans les délices dè l’ivrpsse de l’opium !...
»Peu d’instants après nous rentrâmes à bord; des
esclaves armés nous accompagnèrent jusqu’au rivage,
où une pirogue avait été préparée par les soins du
datou. »
Une nouvelle salve de sept coups de canon faite
par les navires espagnols termina la journée, J’envoyai
dans la soirée une médaille de l’expédition aux
capitaines espagnols Somès et Scribano » commandant
l’un le trois-mâts lu Minerve, l’autre le brig leLéoni-
das, et qui nous avaient rendu de nombreux services
par leurs renseignements sur le caractère des habitants
et les guides qu’ils nous avaient procurés pour
nous indiquer i’aiguade. Le capitaine du Léonidas était
malade ; son second vint en son nom nous faire ses
adieux, et remercier M. Hombron des soins qu’il lui
avait donnés pendant notre séjour. Son navire, en
quittant Solo, devait se rendre directement à Manille
, je le chargeai volontiers de plusieurs lettres ;
mais je refusai, ainsi que M. Hombron, les cadeaux
d’armes des indigènes par lesquels il croyait reconnaître
les faibles services que nous lui avions rendus.
Le capitaine Somès était venu aussi nous apporter
ses derniers voeux de bon voyage ; sur ma demande,
il ajouta encore quelques renseignements curieux
sur le caractère de la population que nous allions
quitter à ceux qui m’avaient déjà été donnés ; je
les consignerai ici pour servir à l’histoire de ces barbares
contrées.
Les navires espagnols et portugais sont à peu près;