remplit. Nous le vîmes souvent, tant dans sa propre maison
que dans celle du gouverneur, et toujours nous éprouvâmes
du plaisir dans la compagnie de ce ministre q u i, â une instruction
solide et à des connaissances variées, joignait une
politesse exquise, et une douceur de caractère réellement
évangélique.
Jacquinot.)
Note 22, page 239.
Je ne descendis à terre que le soir ; nous débarquâmes à côté
du fort, petite forteresse en pierre, armée d’une douzaine de
petits canons, construite en forme; de rectangle avec un bastion
à chaque angle : à l ’époque où elle fut élevée, elle était suffisante
pour repousser les Maures dont on craignait l’attaque, mais elle
ne résisterait pas, dans l’état où elle est aujourd’hui, à quelques
volées d’une corvette. Près de là on passe la rivière sur un
pont ; son cours , qui suit presque parallèlement le rivage,' sert
de fossé d’enceinte à la grande place qui se trouve directement
sous le canon du fort. Au delà, le rivage est garni d’une enceinte
de hautes palissades comme celles des villes malaises, qui
sont suffisantes pour arrêter des hommes qui viendraient l’attaquer
sans artillerie. La ville, qui est presque entièrement composée
de cases en bambou, est bâtie régulièrement; toutes les
yues aboutissent à la grande place et sont parallèles au cours de
la rivière. On remarque seulement sur la place quelques maisons
qui se distinguent des autres par de grandes galeries avancées,
et des murailles blanchies : ce sont celles du gouverneur,
du commandant de la marine et des principales autorités. En
parcourant les rues de cette ville, je me crus transporté dans un
des jolis villages de Lusson. Il offrait, à cette heure du jour, un
tableau vivant et agréable. La population, toute indienne,' me
frappa dès le premier moment par sa supériorité physique sur
les autres peuples d’origine malaise ; l’âir de contentement et de
bonheur qu’on remarquait sur tous les visages compensait avec
avantage l’absence de luxe, de richesses et de det immense mouvement
commercial.des colonies voisines. Après avoir traversé
toute la ville, je profitai du reste du jour pour prolonger ma promenade
dans les environs. Le pays, par sa beauté, la richesse et
la variété de sa végétation, répondit à ce que j’en attendais ;
je pris un joli chemin suivant le cours de la rivière q u i, à
l’extrémité.de la ville, tourne presque à angle droit. D’un côté
se trouvait une plaine fertile parfaitement arrosée et qu’on préparait
alors à' ï’èèévoir IaTsemence du riz;',' et de l’autre côté,
dès vergers plantés de'cocotiers, de bananiers et d’arekiers,
de nippa et d’énormes mangùiers, au milieu desquels étaient dispersées
de jolies habitations. Partout en passant, j’étais accueilli
par les buenas noches des Indiens qui circulaiènt ou qui prenaient
lé frais sur le devant de leurs maisons. La réunion de celles-ci,
répandues sur un espace de près de'deux milles, forme un village
considérable et très-peuplé, qui est en quelque sorte le faubourg
de la ville'. 1
Le monument principal deSamboangan est l’église, qui est située
à une des extrémités de la ville ; elle a l’apparence d’une églisè de
village et elle est isolée sur une grande place ; c’est un grand bâtiment
surmontéd’un petitclocher carré, recouvert d’une toiture à
deux faces, qui laisse apercevoir la cloche. Près delà, sur le bord
de la rivière, on a construit un petit belvédère où se réunissent
chaque jour, pour prendre le frais et se communiquer les nouvelles,
les notables du pays. M. lèiieutenant de vaisseau Acha, qui
m’avait accompagné, m’y présenta le soir même, et j’y fis d’un
seul coup la connaissance du sergent-major de la place, du curé,
et de deux ou trois autres personnes qui étaient avec le gouverneur,
les seuls Européens du pays ou plutôt toute l’aristocratie
de l’endroit. Chacun d’eux s’empressa de m’interroger sur les affaires
politiques de l’Espagne, à laquelle, quoique exilés, ils pre-
VII. M