j2 . entretenaient aussi dans ces îles des missions religieuses,
et j’avais appris aussi qu’il existait une haine
très-grande entre M. de Courvoisier et l’évêque portugais,
haine qui se traduisait souvent en excommunications
réciproques dans les églises d’un même
culte, et jusque dans la chaire apostolique. Pendant
le déjeuner, j’eus lieu de remarquer que les reproches
adressés à nos missionnaires sur leur intolérance religieuse
étaient justement mérités.
Dans sa visite à mon bord, M. l’évêque de Nilopo-
lis s1étaitfait accompagner du prêtre chinois dont j’ai
déjà parlé, et d’un abbé qui attendait son tour, di-
sait-il, pour aller briguer la couronne des martyrs
dans le royaume du Japon. A ce sujet, M. de Courvoisier
se plaignit hautement du capitaine Laplace,
commandant la frégate Y Artémise, à l’occasion de sa
conduite en Cochinchine, où il aurait pu, ajoutait-il,
sauver la vie d’un missionnaire condamné à mourir,
s’il avait voulu faire quelques démonstrations èn sa faveur.
Du reste, M. Balestier fittoutce qui lui était possible
pour établir entre lui et nos prêtres français des
relations amicales qui ne pouvaient être que très-
avantageuses dans l’intérêt de nos missions. Le soir
il nous réunit de nouveau tous à dîner chez lui ; ce
fut là que nous nous fîmes nos adieux. Nos regrets furent
réciproques; pour ma part, j’étais profondément
touché de l’amitié qu’il m’avait témoignée, et je cherchais
à lui exprimer toute ma reconnaissance pour
les services sans nombre qu’il nous avait rendus.
Il était près de onze heures lorsque je ralliai mon
bord. Tons les préparatifs d’appareillage étaient faits;
le lendemain matin nous devions être sous voile; mais
avant de quitter le mouillage, suivant notre habitude,
nous récapitulerons succinctement les remarques
que nous avons faites,
Sincapour, bâtie sur i’île du même nom, s’élève
au fond d’une baie, sur un terrain plat; elle est adossée
à deux collines séparées par une lagune qui forme
un port pour les petits bateaux. Cette lagune est peu
profonde et se trouve presque à sec lorsque la mer est
basse. La ville est divisée en plusieurs, quartiers séparés
par un canal peu profond, dans lequel s’engagent
les embarcations qui veulent accoster le rivage.
Du mouillage on aperçoit sur la droite du canal une
plaine vaste et uniforme, sur laquelle sont assises les
maisons de campagne des Européens qui composent
le quartier neuf. Ces habitations, construites avec
luxe, sont entourées par des clos destinés à former des
jardins. Cette partie de Vile, qui jadis dut être couverte
par des forêts séculaires, est aujourd’hui presque
entièrement dégarnie d’arbres. Les plantations
nouvelles, créées par les Européens, sont trop jeunes
encore pour donner un ombrage si salutaire dans ces
contrées de la zone torride. A gauche du canal s’élève
le quartier chinois, beaucoup plus étendu que le
premier. Là s’élèvent de nombreuses habitations entassées
les unes près des autres, à la manière de nos
, villes d’Europe; toutes sont garnies de galeries,exté^
rieurçs, destinées à garantir les magasins et les promeneurs
des rayons brûlants du soleil. La majeure