de ces animaux, que quelques mauvais plaisants de naturalistes
prétendent se rapprocher beaucoup de notre espèce. Cette intéressante
famille se composait du papa, de la maman, et d’un
charmant jeune homme.
A coté de ce somptueux édifice s’élève une miniature de palais
: c’est la résidence du gouverneur général lorsqu’il quitte sa
magnifique habitation de Buitenzorg pour venir en ville.
Toutes les maisons, ornées d’un élégant péristyle à colonnes et
entourées d’un délicieux jardin qui laisse voir leurs coquettes
façades, sont tenues avec un soin et une propreté tout hollan-
dais j à chaque instant on croirait voir sortir un petit temple
grec d’un bouquet de fleurs.
A cette heure matinale, les rues étaient pleines de monde,
chacun allait a ses affaires ; le riche marchand, nonchalamment
étendu sur les coussins moelleux de sa calèche, se rendait à ses
bureaux, dans la partie de la ville la plus rapprochée de la mer.
Le Javanais, portant sur son épaulé nue un long bambou flexible
auquel étaient pendues deux marmites dont l’une contenait du
riz bouillant, d’une blancheur éblouissante , et l’autre un fourneau
sur lequel cuisaient des viandes nageant dans une sauce
noire, s’en allait criant sa marchandise ; le Chinois, au pas compassé,
marchait gravement sous le parasol monstre que tenait
son esclave, ses petits yeux brillaient de l’espoir du lucre qu’il
comptait faire dans la journée ; l’Arabe, au turban vert, au cafetan
de soie , se rendait à la mosquée , roulant entre ses doigts
les grains, d’un gros chapelet, et une nuée de femmes et d’enfants
se lavaient dans les eaux tièdes du canal.
Au milieu de cette foule si différente par le langage, le costume
et les moeurs, nous passions joyeux et la figure riante. La cuisine
du Javanais était si appétissante que nous voulûmes y goûter;
le brave homme, ravi de tant d’honneur, se confondait en salutations
: son riz était délicieux.
Nous continuâmes notre promenade, suivant toujours le»
bords du canal qui nous conduisit sur une grande place gazon-
née , au milieu de laquelle s’élevait une maigre colonne surmontée
d ’un quadrupède que nous prîmes d’abord pour un boeuf :
c’était un lion, et quel lion? celui de Waterloo|s’il vous plaît!
Ces bons Hollandais, eux-aussi, veulent revendiquer leur part
de cette sanglante journée. Ceux qui ont fait ériger ce monument
ne connaissaient certainement pas la fable du lion qui se
fa it v ieu x .
Cette place, très-vaste, n’est pas encore achevée; sur quatre
faces il lui en manque déux. D’un côté sont des baraques servant
de logement aux officiers de la garnison, de l’autre un édifice
prétentieux et de mauvais goût où sont les bureaux du gouvernement
et la poste.
Des officiers en grande tenue se promenaient à cheval sous les
grandes allées qui ombragent la place. Il paraît que nous portions
sur la figure le cachet de la France, car beaucoup de ces
brillants cavaliers nous saluaient, et les gamins javanais nous
criaient, en passant à côté de nous : orang dis-donc (hommes
dis-donc).
Pour nous , sans nous douter le moins du monde que notre
tenue fût déplacée , nous continuâmes gaiement notre promenade
, flanant, le nez en l’air, examinant à loisir ce qui nous entourait,
'et nous communiquant nos réflexions sur tout ce qui
nous frappait*
Après avoirsuffisamment admiré la place de TValtevreeden et le
lion de Waterloo, nous enfilâmes la première rue qui se présenta
devant nous, et nous fûmes tout étonnés de nous trouver tout a
coup à deux pas d’une redoute gazonnée, entourée d’un fossé
qu’un enfant aurait franchi , et derrière lequel cinq pièces de
seize nous présentaient leurs gueules béantes. Tout cela était
propre, joli, bien tenu, mais beaucoup mieux calculé pour jo u e t
au soldat que pour se défendre contre l’ennemi le plus bénin.
Nous marchions depuis deux heures sans voir de terme à cette*