344 NOTES.
Le nombre des navires qui fréquentent le port de Samboangan
ne dépasse pas le chiffre 15 à 20 dans l’année. Ils y relâchent pour y
prendre des rafraîchissements à l’époque où la mousson les force
à passer dans le détroit de Makassar au lieu de suivre une ligne
plus directe. Quelquefois aussi des pêcheurs de cachalot y passent
quelques jours et apportent aux habitants des étoffes , en
échange des provisions qu’ils embarquent. Il paraît même que
ce commerce est assez lucratif, à en juger par l’empressement
que les habitants mettent à acquérir de nos matelots divers
petits objets de luxe. Les petites fioles contenant des huiles
odorantes, provenant de Singapour, font surtout fureür gj à
chaque fois que j’ai marchandé un kriss, on m’a demandé si
j’avais des étoffes de'soie à doimer en. échange ou à vendre. Je
suis sûr qu’on aurait obtenu bien plus facilement par ce moyen
ces armes pour lesquelles on me demandait dé Miit à quinze
piastres.
Les provisions ne sont pas chères ; les cochons surtout ; on en
a d’assez gros'au prix d’une: piastre; l’un. Les poules sont plus
rares et beaucoup plus chères qu’à; Solo,où nous en avons acheté
jusqu’à dix pour cinq francs ou quatre pour une livre de mauvaise
poudre. En revanche on trouve peu de légumes ; il y a bien des
patates douces, mais il est difficile d’en obtenir des quantités au-
dessus de cinq à six livres;à la fois. La paresse empêche les paysans
de les collecter eu plus grand nombre. Les bonnes bananes
sont assez rares dans cette saison et c’est à peu près le seul fruit
qui soit abondant. On trouve des mangues et divers autres fruits
des colonies, mais en petit nombre. Une femme m’a présenté, il
y a quelques jours, une mangue, en me disant : « Senor, achetez-
» moi ce fruit, Car il n’y en a pas de pareils en Espagne. » J’ai
trouvé cette remarque curieüse ; c’est la première fois que j’èn-
tends un marchand des pays tropicaux manifester cette idée si
simple d’ailleurs.
Presque chaque soir un bon vieux In d io , dont le nom m’échappe,
fait danser chez lui. Des. violons et une flûte forment
l’orchestre qui fait agir les jambes , nues des danseuses, jusqu’à
onze heures du soir et même plus tard. L’amour de la danse est
dans les, moeurs espagnoles, et les' habitants! de Samboangan
sont Espagnols sous ce rapport. Quelques, personnes des deux
corvettes s’étant mêlées une fois à cétte réunion, ont produit
une vive sensation de plaisir ; le bon vieux I n d io , boute-
en-train , est venu leur dire quelques paroles françaises, leur a
parlé du passage des navires de guerre français, commandés
par M. Dubuisson, qui ont relâché sur ce point il y a déjà de
nombreuses années, et a fini dans son effusion par embrasser
ces messieurs.
La familiarité de nos manières étonne ces pauvres Indios;
accoutumés aux manières froides des blancs; ils nous trouvent
charmants. C’est assez naturel : nous les traitons comme on le
fait chez nous à l’égard des personnes de toutes les conditions ,
tandis que les Espagnols pur sang les considèrent absolument
comme étant d’une nature inférieure ; et quoique, en général, ils
agissent avec bienveillance envers eux, néanmoins ils leur font
sentir durement cette prétendue supériorité.
Buenos Fran ce se s, nous dit-on souvent, et souvent encore
on nous demande si nous voulons emmener avec nous quelques
uns des habitants. Plusieurs s’offrent de bonne volonté;
il paraît d’ailleurs que ce penchant existe depuis longtemps,
car il est défendu aux indigènes d’aller trafiquer le long du bord
des navires.
Les recherches de nos naturalistes excitent l’étonnement de la
population. Pourquoi ramassez-vous tant de pierres, demandait
un paysan à un de nos chirurgiens, est-ce pour trouver de l’or?—
Non, répondit M. Lebreton, c’est pour bâtir une maison au
roi de France, avec des pierres prises dans toutes les parties
du monde. fglCaramba ! quel roi puissant ce doit être ! pour
qu’on aille entreprendre de pareils voyages p o r buscar p iedras !