montrer son amitié pour la nation française, avait
demandé le pavillon français ; il paraît que, depuis
cette époque, le drapeau blanc n’a jamais cessé de
flotter sur ces îles encore indépendantes ; seulement
celui que nous aperçûmes était bordé d’un petit liséré
noir et d’un écusson au milieu, représentant
les portes de la Mecque. J’ignore si les habitants ont
conservé dans leurs traditions que le drapeau blanc
était jadis le pavillon delà France, et s’ils savaient, à
Tépoque de notre passage, qu’il avait été remplacé
par le drapeau tricolore; mais ce qu’il y a de certain,
c’est que nos corvettes mirent en émoi la population
tout entière. En un instant tous les hommes accoururent
armés pour défendre leur indépendance qu’ils
croyaient menacée.
Ces insulaires ont de tout temps été adonnés à la piraterie,
rançonnant tous les navires faibles ou mal ar-
més<qui s’aventurent dans ces parages. Le brig goélette
que nous avions trouvé sur la rade était, à ce qu’on
nous assura, un bâtiment de commerce hollandais capturé
depuis fort peu de temps par ces hardis forbans,
qui, depuis cette époque, redoutaient chaque jour
de voir des navires de guerre de Cette nation venir dévaster
leurs demeures pour venger l’insulte faite à
leurs nationaux. L’arrivée de nos corvettes, la ressemblance
de notre pavillon avec celui de la Hollande,
avaient réveillé toutes les craintes de ces hommes, et
üs avaient couru aux armes en noüs voyant arriver.
Ignorant ces événements , j’envoyai, aussitôt
mouillé, un canot à terre pour y porter M. Duroch ;
cet officier avait pour mission d’aller saluer le sultan
de ma part, de lui faire part de mes intentions
amicales, et de le prévenir que le lendemain j’irais le
visiter dans sa demeure. Aussitôt que notre embarcation
toucha au rivage, j’aperçus des troupes nombreuse
de naturels armés de lances qui entourèrent
nos marins. Quelques instants après , je reçus la visite
du capitaine portugais dont le navire était
mouillé sur rade ; il me fitdes naturels un tableau
que je supposais exagéré, mais qui toutefois était peu
rassurant. Aussi ce fut avec plaisir, qu’nne heure
après environ , je vis M. Duroch, accompagné encore
par une foule nombreuse d’hommes armés, regagner
paisiblement son canot qui l’attendait à la plage, pour
revenir à bord. Voici le rapport qu’il me fit à son re^-
tour sur l’entrevue qu’il avait etie avec le sultan,
« En quittant le bord, j’étais assez embarrassé de
ma personne, je ne savais comment je pourrais me
faire entendre des gens auxquels j’allais avoir affaire.
J’allai accoster un des navires espagnols que nous
avions trouvés sur rade ; le capitaine me donna fort
obligeamment un homme pour me servir d’interprète,
et je fis route droit sur le repaire de ces redoutés
forbans. Chemin faisant, je rencontrai une embarcation
portant quatre estafiers de Sa Hautesse qui
gouvernaient sur la corvette j ils rallièrent mon canot,
et je me dirigeai avec eux vers les premières cases
de cette Venise en bambou.
» Nous arrivâmes bientôt sur un vaste banc, sur les
bords duquel sont élevées les premières maisons ;